Macron et le chancelier Scholz ordonnent de débloquer les avions FCAS et le char de combat du futur

Le président Emmanuel Macron et le chancelier Olaf Scholz ont tapé du poing sur la table et rappelé à l'ordre les dirigeants de leurs industries aérospatiales respectives. Ils veulent qu'ils résolvent immédiatement leurs différends et que le FCAS, le programme Future Combat Air System, auquel l'Espagne participe également, reprenne du service.
Le FCAS est bloqué depuis plus d'un an en raison de graves désaccords entre les intérêts de l'avionneur français Dassault Aviation, incarné par son PDG de 62 ans depuis 2013, Eric Trappier, et ceux de son homologue allemand, Michael Schoellhorn, 55 ans, qui dirige Airbus Defence and Space GmbH depuis juillet 2021.
Le différend qui empêche la signature du contrat industriel et qui oblige à suspendre les travaux sur les neuf piliers technologiques du programme FCAS a une raison principale : le refus de Trappier de partager les informations sur les systèmes de contrôle de vol et les technologies furtives. En tant que maître d'œuvre du développement du nouvel avion, Dassault cache sa position en affirmant qu'il ne veut pas qu'Airbus s'immisce dans la gestion de son travail de maître d'œuvre du futur chasseur.

Mais il semble qu'une solution soit en route dans quelques jours. Emmanuel Macron et Olaf Scholz ont décidé de reporter leur sommet bilatéral du 26 octobre afin de venir à leur rencontre annuelle avec leurs devoirs FCAS faits. De plus, des accords ont déjà été conclus sur d'autres programmes militaires communs qui présentent un grand intérêt pour la défense, l'économie et la création de nouveaux emplois dans les deux pays, en particulier pour la France.
Dans le nouveau gouvernement français dirigé depuis mai par la Première ministre Elisabeth Borne, le président Macron a donné son feu vert au remplacement de sa ministre de la Défense, Florence Parly, par Sébastien Lecornu. Colonel de la gendarmerie nationale dans la réserve et homme politique pragmatique, Lecornu était à la tête du portefeuille de l'Outre-mer dans le gouvernement du Premier ministre Jean Castex depuis 2020.

Le président de la République a également donné sa bénédiction au remplacement du chef de la puissante Direction générale de l'armement, l'ingénieur général Joël Barre, 67 ans, qui est depuis août 2017 le compositeur de la musique et des paroles de la politique industrielle de défense française. Son remplaçant depuis le 31 juillet est Emmanuel Chiva, 53 ans, ingénieur civil, docteur en biomathématiques, spécialiste de l'intelligence artificielle et du biomimétisme, qui depuis sa nomination à ce poste compose une partition à jouer à deux mains au piano avec ses partenaires allemands.
La date du Conseil ministériel franco-allemand ne sera annoncée que lorsque les nouveaux ministres de la Défense, Sébastien Lecornu, 36 ans, et Christine Lambrecht, 57 ans, constateront qu'Eric Trappier (Dassault) et Michael Schoellhorn (Airbus Allemagne) ont réglé leurs désaccords. Avec ce règlement en poche, il sera possible de chanter le succès et de sourire sur la photo de famille sur la façade du château de Fontainebleau, à quelque 60 kilomètres au sud-est de Paris, où se tiendra le sommet bilatéral.
En substance, un rapprochement des deux positions opposées sera possible si Dassault permet à Airbus d'être plus présent dans les commandes de vol et la technologie radar-invisible. Quant aux filiales allemande et espagnole de la société européenne, elles devront accorder à Trappier une participation industrielle plus importante dans d'autres piliers technologiques du programme, par exemple le nuage de combat et les drones qui accompagnent et entourent le FCAS.

Paris a dû relever le défi lancé le 12 septembre par le général Eberhard Zorn, inspecteur général de la Bundeswehr - équivalent du chef d'état-major espagnol - devant le Conseil des relations extérieures du Bundestag allemand. "Je veux des matériaux qui volent, roulent et sont disponibles sur le marché, pas des développements de solutions européennes qui, au final, ne fonctionnent pas", a été catégorique le général Zorn. Dans l'urgence, les ministres Lecornu et Lambrecht se sont rencontrés à Berlin le 22 septembre pour aplanir leurs divergences, camouflées par l'actualité de la guerre en Ukraine.
L'industrie de la défense espagnole attend impatiemment qu'Eric Trappier et Michael Schoellhorn se mettent d'accord, afin de pouvoir redémarrer ses travaux fermes, qui sont en suspens depuis l'été 2021, et seulement maintenus dans une certaine mesure par de petits contrats nationaux. La secrétaire d'État à la défense, Amparo Valcarce, a récemment confirmé devant les membres de la commission de la défense du Congrès espagnol que dans le budget 2023, " un poste de 525,69 millions d'euros est prévu pour le FCAS " et qu'en matière de R&D&I " des contrats viennent d'être attribués à Indra pour 17 millions d'euros et à Airbus Espagne pour 14,7 autres millions ".

Le programme FCAS a d'énormes implications pour le renforcement de la souveraineté industrielle, technologique et de défense de l'Allemagne, de la France et de l'Espagne. Les trois nations ont signé l'accord de mise en œuvre n° 3 à Paris le 30 août 2021. Le document a été signé par les ministres Florence Parly (France) et Annegret Kramp-Karrenbauer (Allemagne) et par la secrétaire d'État espagnole à la défense, à l'époque Esperanza Casteleiro, qui n'étaient ni l'une ni l'autre en fonction à ce moment-là.
L'accord de mise en œuvre a officiellement ouvert la porte aux phases 1B et 2 du FCAS, qui devaient commencer au second semestre 2021 par l'élaboration des plans technologiques industriels nécessaires au développement de différents démonstrateurs. Il devait culminer en 2027 avec le vol d'un premier avion démonstrateur. Mais les désaccords entre Airbus et Dassault l'ont bloqué. Désormais, la confiance règne quant à la conclusion de l'accord tant attendu et au décollage, ce qui implique des changements dans le calendrier.

Mais il y a d'autres grands projets en lice. Le plus grand programme d'armement terrestre entre l'Allemagne et la France - auquel l'Espagne ne participe pas - est également bloqué, à savoir le MGCS (Main Ground Combat System). Les tensions se situent entre la société française Nexter et la société allemande Rheinmetall, bien que les ministères de la défense des deux pays se soient déjà mis d'accord sur le concept initial d'utilisation de ce qui doit être le successeur du char français Leclerc et du Leopard 2 allemand.
Avec l'Eurodrone sur les rails et l'Italie et l'Espagne à bord, un autre programme commun qui est tombé en désuétude et qui a peu de chances d'être sauvé est le système de guerre aérienne maritime, ou MAWS. Son objectif est de trouver un remplaçant unique à l'avion de patrouille maritime Atlantique 2 de la Marine française et au P-3C Orion d'origine américaine de la Luftwaffe. Berlin a opté pour une douzaine d'avions P-8A Poseidon du constructeur américain Boeing, et la continuité du programme est remise en question.

Macron souhaiterait également que le chancelier Scholz, avec l'approbation du Bundestag, participe au développement de la configuration Mk-III de l'hélicoptère de combat Tigre que poursuivent la France et l'Espagne. L'Allemagne a décidé de retarder sa présence et a ensuite décidé de ne pas participer au programme de modernisation, bien que son armée dispose de ce modèle d'hélicoptère. Le 21 décembre, le Conseil des ministres espagnol a autorisé un investissement de 1,185 milliard d'euros pour la rénovation du Tigre des Forces aéromobiles de l'armée espagnole (FAMET), qui sera réalisée à l'usine Airbus Helicopters d'Albacete.
Le deuxième chef d'état-major de l'armée française, le général de corps d'armée Hervé Gomart, a confirmé que sur les 67 hélicoptères Tigre de la flotte française, 25 ne seront pas mis à niveau au standard Mk-III si la Bundeswehr ne participe pas au programme avec tout ou partie de ses 53 Tigre. On saura bientôt si le chancelier Olaf Scholz cédera finalement et convaincra également son Bundestag.