Quel est l'avenir du Groupe Wagner en Afrique?

Le groupe Wagner, la société militaire privée la plus connue de Russie, est confronté à un certain nombre de difficultés sur le continent africain, où il mène des activités dans plusieurs pays instables ou déchirés par des conflits. Après la rébellion en Russie, son dirigeant, Evgueni Prigozhin, s'est exilé en Biélorussie. Cependant, le groupe semble tenir bon grâce à son poids économique et géopolitique, et à ses relations étroites avec le Kremlin, qui lui apporte un soutien logistique et diplomatique. Le groupe Wagner peut-il survivre en Afrique sans son chef et après la récente crise interne ? Quel rôle joue-t-il dans la stratégie de la Russie sur le continent?
Selon les médias arabes, la semaine dernière, dans une vidéo mise en ligne par des comptes Telegram se disant proches de Wagner, mais dont l'authenticité n'a pu être vérifiée, Prigozhin a demandé à ses hommes de se préparer à un "nouveau voyage en Afrique". Les observateurs notent que la réorientation des efforts vers l'Afrique pourrait entraîner une légère augmentation du flux de mercenaires, afin de soutenir l'extension de la gouvernance militaire des dirigeants sur le continent brun en renforçant leur soutien personnel en matière de sécurité, tandis que les répercussions des conflits en cours qui s'étendent de la Libye au Soudan seront plus diverses.

Le Groupe Wagner a été créé au début des années 2010 en tant qu'organisation en dehors de tout cadre légal. Le groupe est ensuite devenu le bras armé semi-officiel des ambitions russes en Afrique, tout en permettant à Moscou de nier toute responsabilité dans ses opérations. "Wagner n'est ni une branche de l'armée, ni une entité privée à part entière", explique Maxime Audinet, chercheur à l'Institut de recherche de l'Institut militaire à Paris. "Elle sert les intérêts officiels de Moscou, mais elle répond aussi aux ambitions personnelles de Prigozhin. "Jamais auparavant un organisme non officiel n'avait pris autant d'importance dans les activités internationales de la Russie", ajoute-t-il.
Le groupe Wagner n'est pas non plus étranger au continent africain. Au cours de la dernière décennie, le groupe de mercenaires a été observé dans divers pays du continent africain, tels que la République centrafricaine, le Mali, le Soudan, la Libye et d'autres.

Au Mali, le groupe Wagner a signé des contrats d'exploitation des ressources minérales, en particulier de l'or, dans le pays. Le déploiement de Wagner au Mali a tendu les relations avec la France, qui compte quelque 5 000 soldats combattant les groupes djihadistes dans la région du Sahel. La France a accusé Wagner de porter atteinte à la souveraineté et à la stabilité du Mali. Parallèlement, en République centrafricaine, le groupe Wagner soutient le président Faustin-Archange Touadéra depuis 2018, alors qu'il était confronté à une rébellion armée. Le groupe a assuré la sécurité personnelle du président, ainsi que la formation et le conseil des forces armées nationales. En retour, le groupe a reçu l'autorisation d'utiliser les ressources naturelles du pays, en particulier l'or et les diamants. Outre la diffusion de fausses informations contre l'opposition, le groupe s'est également engagé dans des opérations de propagande et d'influence.
Au Niger, le 26 juillet 2023, un groupe de soldats mutins a renversé le président Mohamed Bazoum. Le coup d'État au Niger a suscité des inquiétudes quant à la sécurité et à la stabilité du pays et de ses environs, ainsi qu'à la possibilité d'une propagation de l'extrémisme et de l'influence de Wagner. Certains analystes ont émis l'hypothèse que la tentative de coup d'État pourrait être liée aux intérêts de Wagner au Niger, le groupe ayant tenté de s'implanter dans le secteur lucratif de l'uranium du pays. Ils ont également mis en garde contre toute implication possible de Wagner ou d'autres acteurs étrangers dans les affaires du Niger, affirmant que cela mettrait en péril la souveraineté et la sécurité du pays.
Là comme ailleurs, le groupe est accusé d'influencer l'opinion publique, de saper la réputation de l'Occident et d'influencer les processus électoraux. Au niveau militaire, son approche est brutale et fait peu de cas de la distinction entre civils et militaires ou des droits de l'homme. En janvier, les États-Unis ont désigné l'organisation de Prigozhin comme une organisation criminelle transnationale et lui ont imposé des sanctions. Un expert indépendant des Nations unies a accusé l'armée centrafricaine et ses alliés russes de commettre des atrocités. L'Union européenne a annoncé de nouvelles sanctions à l'encontre de plusieurs représentants de Wagner dans le pays. La semaine dernière, le Royaume-Uni a imposé des sanctions à des personnes et des entreprises accusées d'avoir participé aux atrocités commises par Wagner, notamment "des exécutions et des actes de torture au Mali et en République centrafricaine, ainsi que des menaces pour la paix et la sécurité au Soudan".

Le groupe Wagner fournit des services militaires aux gouvernements et aux acteurs non étatiques dans un certain nombre de pays en conflit et instables, en particulier en Afrique et au Moyen-Orient. En retour, le groupe reçoit des paiements sous forme de ressources naturelles, telles que l'or, les diamants et le pétrole. Le groupe se livre également à des opérations de propagande et d'influence, en créant des médias favorables au Kremlin et en diffusant des fausses nouvelles à l'encontre de ses opposants. Le groupe Wagner travaille à la fois pour le Kremlin et pour ses propres intérêts.
L'avenir du groupe Wagner en Afrique reste incertain, mais sa disparition semble hors de question. Sa présence sur le continent démontre la volonté de la Russie d'étendre sa sphère d'influence et de concurrencer d'autres nations, en particulier l'Occident et les États-Unis. La progression de l'invasion de l'Ukraine par la Russie influencera un éventuel retrait partiel des mercenaires africains vers le front ukrainien. Toutefois, le groupe constitue également une menace pour la démocratie et les droits de l'homme, ainsi que pour la stabilité et la sécurité dans la région. La communauté internationale doit surveiller de près ses opérations et exiger des responsables qu'ils fassent preuve de transparence et qu'ils rendent des comptes.