Alors que la crise sanitaire de la Covid-19 semble derrière nous, l’Algérie est confrontée à des enjeux internes et externes complexes. Cet article plonge dans la réalité économique de l'Algérie, explore les défis liés à l'inflation et examine les mesures prises par le gouvernement

Les enjeux de l’inflation en Algérie : la stratégie du gouvernement pour stabiliser l’économie

AFP/LUDOVIC MARIN - Una bandera nacional de Argelia ondea cerca de la Bahía de Argel en el casco antiguo de la capital conocido como Kasbah
AFP/LUDOVIC MARIN - Un drapeau national algérien flotte près de la baie d'Alger, dans la vieille ville de la capitale, connue sous le nom de Casbah

Alors que l'année 2023 est marquée par une inflation à des niveaux historiques, une économie mondiale en ralentissement, et des défis géopolitiques persistants, l'Algérie se trouve confrontée à une conjoncture économique complexe. L'inflation, qui atteint des sommets depuis plusieurs décennies, et le coût de la vie en constante augmentation ont mis à l'épreuve la résilience économique du pays.

Ce contexte de crise internationale, exacerbé par les effets durables de la pandémie de Covid-19 et la guerre russo-ukrainienne, a incité de nombreux gouvernements à adopter des mesures d'urgence pour stabiliser leurs économies. L'Algérie ne fait pas exception. 

Dans cet article, nous examinerons les défis de l'inflation en Algérie et les mesures que le gouvernement algérien entreprend pour atténuer les impacts économiques et assurer la stabilité du pays.

AFP/RYAD KRAMDI - Los argelinos desempleados esperan afuera de una agencia de empleo local en el barrio de Bab El Oued de la capital, Argel
AFP/RYAD KRAMDI - Des chômeurs algériens attendent devant une agence locale pour l'emploi dans le quartier de Bab El Oued, à Alger

En Algérie, l'indice des prix à la consommation ne cesse d’augmenter

Tout comme le reste des pays arabes, l’Algérie fait face actuellement à des défis économiques, d’où « la nécessité de consentir davantage d’efforts, d’agir et d’adopter des politiques à même de répondre aux exigences de la croissance économique », a expliqué le directeur général et président du conseil d’administration du Fonds monétaire arabe (FMA), Abdul Rahman bin Abdullah Al Humaidi, cité par l’APS.

Depuis 2020, l'Algérie connaît des phénomènes renouvelés de prix élevés et de pénurie. Selon le rapport Trading Economics 2023, l’Algérie se positionne à la 33ème place du classement mondial en matière d’inflation. 

Selon le dernier rapport de l’Office National des Statistiques (ONS), la variation des prix à la consommation au mois de juillet 2023 est de +9,4 %. Le rythme d’inflation annuel (août 2022 à juillet 2023 / août 2021 à juillet 2022) est de +9,3 %. En outre, l’évolution des prix des biens alimentaires enregistre un taux de +13,2 %. En effet, les prix des produits agricoles frais marquent une variation de +22,4% avec un taux de +62,5 % pour les fruits. Toutefois, les prix des produits alimentaires industriels accusent une hausse largement en deçà, soit 4,6 % avec une variation de +22,2 % pour le café, thé et infusion.

PHOTO/AFP - Los argelinos compran verduras en un mercado abierto en la capital, Argel, el 15 de septiembre de 2022
PHOTO/AFP - Des Algériens achètent des légumes sur un marché ouvert dans la capitale Alger, le 15 septembre 2022

Selon Al-Arab News, au milieu de la volatilité des prix de l'énergie, les coûts des matières premières essentielles, notamment les céréales, ont connu une série d'augmentations successives. Les prix combinés de la viande, des céréales, des huiles, du sucre et des produits laitiers ont enregistré une hausse d'environ 20 % en début d'année.

Malgré les apparences, l’agence de presse Algérie 360 affirme que l’Algérie fait partie des pays africains qui ont gardé un semblant d’équilibre entre inflation majeure et stabilité. Toutefois, Alger reste confronté à de nombreux défis.

REUTERS/RAMZI BOUDINA - Varios productos lácteos se exhiben entre otros artículos para la venta dentro de una tienda en Argel, Argelia, 17 de noviembre de 2021
REUTERS/RAMZI BOUDINA - Des produits laitiers sont exposés parmi d'autres articles à vendre dans un magasin à Alger, en Algérie, le 17 novembre 2021

« L’économie mondiale est en voie de redressement, mais toujours pas sortie d’affaire »

La situation en Algérie semble refléter la tendance générale de l'économie mondiale. Pierre-Olivier Gourinchas, conseiller économique et directeur des études du FMI, affirme en effet que, bien que l’économie mondiale soit en voie de redressement, elle n’est « toujours pas sortie d’affaire ». 

Si la crise sanitaire due à la Covid-19 semble être terminée, avec des chaînes d'approvisionnement rétablies, une activité économique résiliente au premier trimestre et une baisse des prix de l'énergie et des denrées alimentaires après avoir atteint des pics avec la guerre en Ukraine, des défis subsistent et assombrissent l'horizon économique.

Au niveau interne, nous avions déjà vu dans un précédent article que le marché algérien connaît une hausse constante des prix des légumineuses sèches sur les marchés locaux, malgré la baisse de leur consommation saisonnière, ainsi qu’une pénurie dans les produits d’épicerie et les espaces de vente au détail.

REUTERS/RAMZI BOUDINA - Una mujer argelina compra en un supermercado de la capital, Argel
REUTERS/RAMZI BOUDINA - Une Algérienne fait ses courses dans un supermarché à Alger, la capitale

Selon les prévisions du FMI, la croissance ralentira, en passant de 3,5 % l’an dernier à 3 % cette année et l’année prochaine, soit une amélioration de 0,2 point de pourcentage pour 2023 par rapport aux projections d’avril. L’inflation mondiale devrait passer de 8,7 % l’an dernier à 6,8 % cette année – soit une révision à la baisse de 0,2 point de pourcentage – et à 5,2 % en 2024.

Selon Al-Arab News, le Fonds monétaire international avait mis en garde l'Algérie, en février dernier, contre la poursuite d'une politique monétaire indulgente au vu d'indicateurs inquiétants concernant le taux des prix à la consommation, malgré l'amélioration de ses finances publiques grâce aux recettes pétrolières et gazières. La mission du FMI avait alors déclaré après la conclusion des consultations au titre de l’article 4 : « La politique monétaire doit être resserrée sans délai pour éviter l’instabilité des attentes d’inflation élevées dans le pays ».

Dans ce contexte, la Banque centrale avait réduit le taux d'intérêt de moitié au début du dernier trimestre de l'année dernière pour atteindre 10 pour cent, même si le taux d'inflation était encore à des niveaux élevés après la guerre en Ukraine.

PHOTO/Agencia fotográfica anfitriona RIA Novosti vía REUTERS 
 - El presidente de Argelia, Abdelmadjid Tebboune
PHOTO/Agence photo RIA Novosti via REUTERS - Le président algérien Abdelmadjid Tebboune

Les initiatives du gouvernement algérien

Pour faire face à cette situation, le ministre des Finances algérien Abdel Aziz Fayed a présenté mardi à l’Assemblée populaire nationale (ANP) le projet de loi de finances rectificative (PLFR) 2023.

Selon le blog Algerie eco, ce projet comprend « des dispositions visant à prendre en charge les dépenses ordinaires supplémentaires induites par les mesures prises par les autorités publiques pour préserver le pouvoir d’achat des ménages, renforcer la sécurité alimentaire et appuyer le programme d’investissement public dans certaines wilayas ».

La rédaction affirme que le PLFR 2023 prévoit une hausse des recettes budgétaires de l’État de près de 13 %, pour atteindre près de 9 000 milliards (mds) de DA, et une augmentation des dépenses à plus de 14 700 mds de DA (+6,7 %). S’agissant de la croissance économique, il est attendu en 2023 une croissance de 5,3 %, contre 4,1 % prévue dans la loi de finances initiale pour 2023, tirée principalement par le secteur des hydrocarbures (+6,1 %). La croissance du PIB hors hydrocarbures se situe, quant à elle, à 4,9 % dans le PLFR 2023.

Selon l’agence Algérie Presse Service (APS), les membres de l’APN ont salué cette initiative. Les députés ont notamment salué à tour de rôle la politique de revalorisation des salaires qui « préserve la dignité du citoyen » ou encore les dernières décisions du président de la République relatives au soutien des agriculteurs.

REUTERS/RAMZI BOUDINAA - Gente comprando en el supermercado en Argel, Argelia
REUTERS/RAMZI BOUDINAA - Des personnes font leurs courses au supermarché d'Alger, en Algérie

Réduire le coût des importations, mesure phare du ministre algérien Fayed

Le ministre des Finances, Aziz Fayed, a confirmé lors de cette même séance, que les mesures prises par les autorités pour assurer la disponibilité des matériaux de base et contrôler et soutenir leurs prix permettraient de réduire davantage le taux d'inflation. Parmi ces mesures, la réduction des coûts d’approvisionnement des biens et des marchandises depuis l’étranger sera la plus fortement encouragée. 

Pour accroître la capacité d’approvisionnement en produits agricoles et alimentaires ainsi que contrôler et soutenir les prix des biens de consommation de base, l’État algérien souhaitent réviser à la baisse les taux des droits de douane. Les autorités seront également chargées de surveiller les prix et de lutter contre la spéculation sur les prix des matières premières, ce qui devrait réduire l'inflation au cours des mois restants de l'année en cours.

Selon le ministre, et cité par Al-Arab News, les autorités travaillent sur la question de la rationalisation des importations, qu'elles ont réussi à réduire d'environ 60 milliards de dollars en 2014 à moins de 39 milliards de dollars l'année dernière.

Dans un contexte d'incertitude économique mondiale, l'Algérie poursuit ses efforts pour faire face aux défis actuels. Alors que l'inflation persiste et que des bouleversements géopolitiques subsistent, le gouvernement algérien a mis en place des mesures importantes pour protéger l'économie nationale. 

Les actions entreprises, telles que la réduction des coûts d'approvisionnement, la révision des droits de douane et le soutien à l'investissement, reflètent une détermination à maintenir la stabilité tout en stimulant la croissance. Bien que les taux d’inflation élevés représentent un défi majeur pour le gouvernement, Aziz Fayed espère que ces mesures porteront leurs fruits d'ici la fin de cette année, lorsque l'indice d'inflation atteindra environ 7,5 %.