Les centres de santé marocains utilisent déjà la chloroquine - commercialisée sous les noms de Nivaquina et Plaquenil - un médicament pour traiter le paludisme et le lupus, pour soigner les personnes atteintes de la COVID-19. Cela a été autorisé lundi par le ministre de la Santé, Khalid Ait Taleb. Vendredi dernier, elle a été recommandée par le comité technique et scientifique qui conseille les autorités du pays voisin dans la lutte contre le coronavirus.
Comme le rapporte le portail économique Econostrum.info, le ministère marocain de la santé a décidé dimanche dernier d'acquérir auprès de l'entreprise pharmaceutique Sanofi Maroc -filiale de l'entreprise française Sanofi-, basée à Casablanca, la totalité de ses actions Nivaquina et Plaquenil. Nivaquina est essentiellement de la chloroquine, tandis que Plaquenil contient de l'hydroxychloroquine, un dérivé de celle-ci. « Sanofi Maroc a répondu favorablement à cette demande de mise à disposition [des autorités marocaines] de tous ses stocks actuels. La fourniture et les conditions d'utilisation de ce produit seront de la seule responsabilité du ministère marocain de la santé », a déclaré la filiale marocaine du groupe pharmaceutique français.
Après que certaines informations aient été publiées selon lesquelles le « stock » acquis par Rabat était destiné à être exporté vers l'Afrique subsaharienne, la société française a déclaré que la Nivaquina fabriquée dans les installations de Casablanca n'est autorisée que pour le marché marocain et ne peut être exportée.
Au Maroc, selon les données recueillies par le journal L'Économiste, environ 10 000 boîtes de Plaquenil sont consommées par mois, qui sont prescrites principalement aux patients atteints de lupus érythémateux ou de polyarthrite rhumatoïde afin de réduire l'inflammation. Une boîte de 30 comprimés de 200 milligrammes de Plaquenil coûte environ 51 dirhams (environ 5 euros) dans les pharmacies du voisin du sud. En revanche, une boîte de 20 comprimés de 100 milligrammes de Nivaquina coûte 12 dirhams (un peu moins de 1,2 euros).

Le comité technique et scientifique susmentionné, qui conseille le gouvernement marocain, recommande aux médecins spécialistes de prescrire initialement 500 milligrammes de Nivaquina par jour en deux doses sur six jours, ou de Plaquenil en doses de 200 milligrammes trois fois par jour sur dix jours, rapporte L'Économiste.
En outre, le traitement à la chloroquine implique également la fourniture d'azithromycine ; 500 milligrammes le premier jour et 250 milligrammes du deuxième au septième jour, rapporte le journal économique marocain précité. Si elle n'est pas très efficace, la deuxième option est la combinaison de lopinavir/ritonavir à des doses de 400 milligrammes deux fois par jour pendant dix jours. Le traitement comprend également la prescription d'antibiotiques.
Le ministre marocain de la santé a souligné la nécessité de respecter le circuit d'approvisionnement pour garantir la sécurité d'utilisation et a insisté sur le fait que le composé susmentionné « ne doit pas être utilisé pour des pathologies autres que les coronavirus ».
Le débat sur l'utilité de ce médicament utilisé depuis 70 ans contre le paludisme pour lutter contre la COVID-19 est ouvert. Et étant donné la situation de la pandémie, il ne s'agit pas seulement d'une discussion marocaine, mais d'une discussion mondiale. En France, le gouvernement a également décidé ces dernières heures d'autoriser l'utilisation de la chloroquine dans le cas de « patients graves » et sous « strict contrôle médical ». Depuis Paris, prudence.
Le fait est qu'il faut se rendre en France, plus précisément à Marseille, pour comprendre l'émergence de cette drogue. Et cherchez le Dr Didier Raoult, directeur de l'Institut d'Infection IHU Méditerranée. Il s'agit du premier essai clinique au monde à prouver l'efficacité de la chloroquine contre l'infection par COVID-19. Pour le médecin français atypique et renommé, la chloroquine est le « traitement le moins cher et le plus simple » pour lutter contre le coronavirus, selon Le Nouvel Observateur. Selon l'essai, sur 24 personnes malades, les trois quarts ont été guéries après six jours de traitement avec le composé. Jusqu'à mardi après-midi, Raoult faisait partie du conseil scientifique qui conseille le gouvernement français sur la crise des coronavirus, fait écho au Figaro.
En Tunisie, le ministre de la Santé a annoncé samedi qu'il avait autorisé plusieurs centres médicaux à utiliser la chloroquine contre le coronavirus, se fait l'écho de l'hebdomadaire tunisien Réalités. Loin de là, en Chine, l'épicentre de la pandémie, de nombreux essais cliniques sont en cours pour tester l'efficacité de la molécule.

Malgré les résultats apparemment encourageants de certains essais cliniques et le fait que plusieurs pays l'utilisent déjà, la communauté scientifique est prudente lorsqu'elle décide de l'efficacité de la chloroquine. Un exemple de cette mise en garde est l'Organisation mondiale de la santé, qui avait rapporté lundi que la chloroquine est l'une des options envisagées dans un vaste essai clinique mondial pour trouver un traitement possible pour le coronavirus, rapporte l'agence EFE. « Il existe des preuves de son utilité, mais aucune étude claire et rigoureuse n'a été réalisée pour prouver ou infirmer l'efficacité de la chloroquine », explique Soumya Swaminatha, scientifique en chef de l'OMS.
La semaine dernière, le président américain Donald Trump a qualifié la drogue de « très puissante » sur les caméras de CNN et a déclaré qu'elle avait donné « des premiers résultats très encourageants ». Mais la Food and Drug Administration (FDA, par son acronyme en anglais) américaine a modifié le locataire de la Maison Blanche d'une certaine manière : il faut davantage d'études avant de pouvoir tirer des conclusions définitives.
La responsable du département des vaccins et des produits biologiques de l'OMS, Ana Maria Henao-Restrepo, déclare qu'il s'agit d'une « situation très complexe », mais qu'il existe un réel intérêt « à explorer davantage le potentiel de la chloroquine ».
Par ailleurs, le décret-loi relatif aux dispositions relatives à l'état d'urgence sanitaire et aux modalités de sa déclaration, ainsi que celui relatif à la déclaration de l'état d'urgence sanitaire sur l'ensemble du territoire marocain, ont été publiés ce mardi au Bulletin officiel de l'Etat. Le nombre de cas confirmés de coronavirus au Maroc au moment de la publication de ce texte s'élevait à 170. Cinq personnes sont décédées et 6 ont surmonté l'infection.