Les femmes afghanes sans voix

<p>Una mujer bajo su burka caminando por una calle en la ciudad vieja de Kabul - AFP/NICOLAS ASFOUR</p>
Une femme sous sa burqa marchant dans une rue de la vieille ville de Kaboul - AFP/NICOLAS ASFOUR
Imposition et annulation. Deux termes que les femmes afghanes subissent de plus en plus depuis l'arrivée des fondamentalistes en 2021

C'est un adieu à tout ce qui a été accompli, un retour à un passé qui non seulement les ignore, mais aussi les oublie, les punit, les torture... Il est difficile de vivre ce que l'on ne s'attend pas à vivre, de revenir à une époque de la vie que l'on croyait déjà révolue, d'aller en arrière au lieu d'aller en avant. Mais nous n'apprenons pas, nous ne voulons pas apprendre. 

Les droits des femmes sont érodés en même temps que leur dignité. Tout est permis dans ce monde d'hommes extrémistes qui s'appuient sur la soi-disant loi morale pour dicter des ordres incompréhensibles et inhumains. La dernière chose qui leur a été enlevée, c'est leur voix. 

Écouter une femme chanter ou réciter des vers lors d'un événement public est contraire à la morale. C'est la principale raison que les talibans ont invoquée il y a quelques mois pour les acculer davantage dans un pays, l'Afghanistan, qui, en trois ans, a régressé de plusieurs dizaines d'années. 

Nous vivons une époque troublée où plus rien n'est sûr, où tout peut changer, même s'il n'y a pas de sens, où le radicalisme se développe rapidement, où les eaux cristallines des rivières peuvent déborder, changer de couleur ou s'assécher. L'invraisemblable devient soudain réel. Ce qui est maintenant ou qui est là peut ne pas être ou disparaître en un instant. 

N'oubliez pas les images des talibans entrant dans Kaboul. L'horreur, la peur... les gens qui fuient, cet aéroport, le retrait des troupes américaines... Cela fait maintenant trois longues années que le compte à rebours rapide a commencé. La population en subit les conséquences. Naître et être une femme dans ce coin du monde, c'est n'être rien. 

Les voix des femmes afghanes ne sont pas entendues, mais elles ne sont pas vues non plus. Elles ont déjà été contraintes de se couvrir du voile intégral. Pas de vêtements qui collent, pas de vêtements qui insinuent... Pas de maquillage ou de peinture sur ces visages qui doivent aussi être cachés, peut-être pour que les larmes de frustration, le regard de tristesse et d'indignation, la terreur de ce qui se passe à nouveau ne soient pas vus non plus. En dehors aussi de ce parfum qui pourrait nous rappeler d'autres femmes dans d'autres pays où elles jouissent de la liberté, des droits que toute personne devrait avoir.  Des lois et encore des lois qui peuvent même tuer au nom de la moralité. 

L'Afghanistan est le pays des règles qui restreignent ; il n'y a pas d'autres droits que ceux qui n'existent pas, des impositions et des obligations qui effacent les sens, qui ne permettent pas de voir ou d'entendre, de sentir ou de ressentir... ou de vivre avec dignité. 

Naître femme est une honte. Et quelle tristesse que cette affirmation. Les filles de plus de 12 ans doivent interrompre leurs études. L'enseignement secondaire leur est interdit... et l'illusion d'aller à l'université est hors de question.  Les femmes éduquées, éduquées, éduquées ne les intéressent pas. La manipulation est plus facile quand il y a ignorance et ignorance. L'analphabétisme avec un nom de femme est de retour, autant d'illusions enterrées ! 

Ne nous taisons pas, n'oublions pas, ne permettons pas que les voix de ces femmes soient réduites au silence pour toujours. Renonçons à la nôtre pour élever et crier ce qu'elles ne peuvent pas. Mettons des vers en l'air pour qu'ils coulent, pour qu'ils volent, même si les ailes de leurs auteurs ont été coupées, pour que l'espoir ne meure pas. Dénonçons et souvenons-nous comme l'actrice Meryl Streep, qui a parlé de cette situation devant l'ONU à New York, ou l'Association espagnole des écrivains (ACE) qui, à l'occasion de la Journée des femmes écrivains, a lu des textes d'écrivaines afghanes rassemblés dans « Le suicide et le chant, une œuvre traduite par Clara Janés ». Petits ou grands actes qui s'additionnent et s'additionnent. 

Si leurs voix ont été réduites au silence, que les nôtres soient les leurs.