Le droit international à l'étage

Policías vigilan fuera de la Embajada de México en Quito el 8 de abril de 2024 – PHOTO/Rodrigo BUENDÍA/AFP
Policías vigilan fuera de la Embajada de México en Quito el 8 de abril de 2024 – PHOTO/Rodrigo BUENDÍA/AFP

La pire nouvelle que nous puissions avoir en tant qu'êtres humains et citoyens d'un monde globalisé, c'est lorsque la loi du plus fort prévaut et que le droit international, les traités, les accords et les conventions sont foulés aux pieds, et que les organisations multilatérales sont ignorées.  

Un avenir qui ignore l'architecture du droit international et du multilatéralisme ouvre la porte à la loi de l'ancien Ouest : la brute du quartier imposera ses règles et ses conditions. Dangereux ! 

La descente des forces de sécurité à Quito dans les locaux de l'ambassade du Mexique en Équateur pour arrêter l'ancien vice-président équatorien Jorge Glass est une violation flagrante du droit international et de la Convention de Vienne sur l'inviolabilité des sièges diplomatiques étrangers.  

Signée en 1961 par les représentants de 81 États, la Conférence de Vienne sur les relations diplomatiques constitue un cadre commun pour l'exercice de la diplomatie entre les pays ; elle jette les bases du fonctionnement de la mission diplomatique et établit les privilèges et les droits des ambassadeurs respectifs dans les pays de destination.

Chaque ambassade est un élément de la souveraineté à l'étranger de son pays respectif. Ce n'est pas seulement le consulat ou le bâtiment qui abrite l'ambassade qui fait partie de ce cadre d'immunité, mais aussi le domicile de l'ambassadeur.  

À juste titre, le gouvernement mexicain a retiré tout le personnel de sa délégation diplomatique en Équateur et met en œuvre les instances et procédures internationales correspondantes pour déposer une plainte auprès des plus hautes autorités afin que le gouvernement du président Daniel Noboa reçoive une sanction quelconque. En outre, le pays aztèque devrait annuler tout accord commercial ou économique avec Quito. 

Ce qui est certain, c'est qu'il ne s'agira pas d'une petite fissure dans les relations internationales de la région et qu'elle aura certainement des conséquences dans les réunions multilatérales dans le cadre de l'OEA, de la CELAC et d'autres organisations. La position adoptée par les pays d'Amérique latine à cet égard sera transcendante.

La réponse de l'ONU, de la Cour internationale de justice et de l'OEA sera tout aussi importante ; ce qui ne peut pas arriver, c'est que cet outrage reste sans conséquences.  

Le risque d'une absence de sanction sévère à l'encontre de l'Équateur est que, par les temps qui courent, cela devienne une spirale d'événements qui se répètent dans d'autres pays pour des griefs, des représailles, des frictions, du terrorisme ou de simples provocations.  

Sur le sujet 

L'architecture du droit international et du multilatéralisme n'est pas parfaite, mais elle est perfectible. Le monde a changé avec l'ère numérique et les cybermenaces ainsi que les guerres hybrides représentent une réalité qui n'avait pas été envisagée dans le cadre théorique et conceptuel d'il y a quelques décennies. 

Néanmoins, nous l'avons et c'est louable. Le problème le plus grave est que l'érosion est pressante. Le droit est un gentleman's agreement, il suffit que les deux parties le reconnaissent, le respectent et le pratiquent pour qu'il existe.      

Le nœud du problème, c'est quand l'un ne le respecte pas et que l'autre le relègue au second plan. "Consumatum est". Dans ce cas, chacun prend la loi en main et fait ce qu'il veut. 

L'attaque d'une ambassade devrait être un "casus belli". C'est curieux, mais personne n'a osé le faire jusqu'à présent. Pas même les États-Unis qui, le 4 novembre 1979, ont subi l'enlèvement de 66 diplomates et citoyens américains par un groupe d'étudiants qui ont pénétré dans le consulat et l'ambassade des États-Unis à Téhéran.  

Cette crise, la plus longue de mémoire d'homme, s'est terminée le 20 janvier 1981 et a coûté sa réélection au président Jimmy Carter. Et non, il n'a pas déclaré la guerre à l'Iran.  

Il existe d'autres événements tout aussi dramatiques. Le 27 septembre 1975, des militants d'extrême gauche ont incendié l'ambassade d'Espagne à Lisbonne pour protester contre les cinq exécutions annoncées par le dictateur Francisco Franco.  

Le 31 janvier 1980, la police guatémaltèque a pénétré dans l'ambassade d'Espagne, envahie par un groupe de paysans ; 37 personnes ont été tuées dans la bagarre, dont le père de Rigoberta Menchú, lauréate du prix Nobel de la paix.  

Nous avons de nouveau entendu parler d'incidents diplomatiques à cause de Julian Assange, fondateur de Wikileaks et recherché par la justice américaine après avoir divulgué des centaines de documents classifiés sur Internet.   

Le 19 juin 2012, Assange a demandé l'asile politique à l'ambassade d'Équateur à Londres pour éviter d'être extradé vers les États-Unis ; il y a passé près de sept ans jusqu'à ce que le président Lenin Moreno déclare qu'Assange était une nuisance diplomatique pour son pays : la nationalité équatorienne qui lui avait été accordée en 2017 lui a été retirée et il a finalement été détenu par les autorités britanniques à l'intérieur de l'ambassade d'Équateur.

Ces incidents témoignent du rôle vital que jouent les missions diplomatiques, et c'est pourquoi leur protection en vertu du droit international doit être préservée.