Attaque boomerang
On peut parler d'une attaque boomerang car, en rejetant d'emblée l'action de ce jeune homme de 20 ans par une condamnation catégorique et sans appel, l'excentrique personnage qui entend retrouver le fauteuil de la Maison Blanche récolte ce qu'il a semé depuis trop longtemps. Il est très dangereux, très inquiétant et absolument inacceptable que la violence apparaisse à tout moment dans la vie des gens, mais beaucoup moins dans la sphère politique où le respect et la tolérance pour les idées et les positions de chacun des adversaires sont particulièrement essentiels. Et d'insister sur les adversaires, pas sur les ennemis.
Les lignes rouges qui devraient protéger la démocratie, la liberté, l'État de droit et l'État-providence pour lesquels nous, démocraties libérales occidentales, avons travaillé dur et fait de grands sacrifices, sont dépassées avec trop d'impunité par des populistes autoritaires qui recherchent le pouvoir à tout prix et alimentent une polarisation qui conduit à une violence inacceptable à tous points de vue.
L'auteur de l'attentat, Thomas Matthew Crooks, utilisant un fusil semi-automatique sur le toit d'une grange à quelque 200 mètres du lieu du rassemblement à Butler, en Pennsylvanie, a été abattu par des membres des services secrets américains qui devront expliquer les raisons d'un manquement aussi grave à la sécurité. Il est vrai que les experts en matière de sécurité et de protection des hauts fonctionnaires expliquent qu'il est très difficile d'empêcher un attentat si l'auteur est prêt à mourir après avoir été découvert parce qu'il n'a pas de possibilité de fuite garantie, comme cela a été le cas ici.
La liste des attentats contre des présidents et des hauts fonctionnaires aux États-Unis est trop longue dans l'histoire, mais il n'y a pas eu de tentative d'assassinat d'une telle ampleur depuis 1981, année où le républicain Ronald Reagan a été touché par plusieurs balles. La question est de savoir ce qui se passe maintenant. Il est quelque peu étonnant et embarrassant que, compte tenu de la gravité de la situation, Trump tente d'apparaître comme un héros, en levant le poing et en criant : ripostez, alors que les services de sécurité risquent leur vie pour empêcher que d'autres coups de feu ne soient tirés.
La capacité de Trump à renverser des situations compliquées n'est pas surprenante. Chaque fois qu'il sort d'un tribunal avec une condamnation, il parvient à remonter dans les sondages. Personne ne doute que cette tentative d'attentat, avec une balle qui frôle son oreille droite, du sang sur son visage et sa chemise, va malheureusement lui donner un sérieux coup de pouce dans la campagne électorale. Ou pas. Joe Biden pourrait bien recevoir la balle, mais il a appelé Trump à condamner fermement cet acte de violence, qui démontre la maladie qu'est l'Amérique.