Une étincelle suffit

Retratos de los niños y jóvenes muertos cuelgan de la valla del estadio de fútbol donde cayó un cohete, en el pueblo druso de Majdal Shams, en los Altos del Golán anexionados por Israel, el 29 de julio de 2024, en medio de los continuos enfrentamientos transfronterizos entre tropas israelíes y combatientes de Hezbolá – PHOTO/Jalaa MAREY/AFP
Des portraits d'enfants et de jeunes morts sont accrochés à la clôture du stade de football où une roquette a atterri, dans le village druze de Majdal Shams, sur le plateau du Golan annexé par Israël, le 29 juillet 2024, dans le cadre des affrontements transfrontaliers entre les troupes israéliennes et les combattants du Hezbollah - PHOTO/Jalaa MAREY/AFP
En plein mois d'août, alors que certains d'entre nous sont distraits par les pérégrinations peu éthiques de Begoña et les manigances de Puigdemont, que d'autres sont apathiques et que le reste est anesthésié par les Jeux olympiques de Paris, un conflit majeur risque d'éclater à tout moment au Moyen-Orient.

On dit que si l'on a dix terroristes et que l'on en tue deux, il en reste... vingt, et cela explique ce qui se passe, Israël assassinant ses ennemis sans parvenir à stopper les mouvements de tête.

D'abord parce qu'on ne tue pas les idées avec des bombes. Ensuite, parce que les dirigeants de groupes comme le Hamas ou le Hezbollah savent que la mort va de pair avec le travail et ont des remplaçants tout trouvés. Troisièmement, parce que les martyrs ont toujours des partisans ; et quatrièmement, parce que ces assassinats ciblés augmentent les tensions qui sont déjà très fortes. C'est le cas depuis le 27 juillet, date à laquelle l'un des nombreux missiles que le Hezbollah lance quotidiennement sur Israël (généralement sans grand effet) a touché un village druze sur les hauteurs du Golan (territoire syrien occupé par Israël), tuant douze enfants, bien que le Hezbollah démente ces faits avec peu de crédibilité. Quoi qu'il en soit, trois jours plus tard, un missile israélien a tué le numéro deux du Hezbollah, Fuad Al-Sukr, à Beyrouth, et un jour plus tard, une mystérieuse explosion a tué le chef du Hamas, Ismail Haniye, à Téhéran. Ces cas sont différents de la mort, lors d'une opération militaire à Gaza, de Mohamed Deif, le numéro deux du Hamas, qui a porté un nouveau coup à l'organisation.

Ils sont différents parce que, tout en soulignant l'extraordinaire capacité d'Israël à mener des opérations de renseignement sophistiquées à des kilomètres de distance, la mort d'al-Sukr et de Haniye, loin du théâtre de la guerre, est considérée par beaucoup comme une provocation. Le Hezbollah ne veut pas d'une guerre ouverte avec Israël, car le coût en serait trop élevé. Mais il n'a pas d'autre choix que de répondre à la mort de son chef et la façon de le faire qui inquiète le plus Jérusalem n'est pas de continuer à tirer des roquettes (il en a beaucoup mais Israël est très bon pour les intercepter), ce que les Israéliens craignent le plus est une incursion armée au sol comme celle que le Hamas a faite le 7 octobre parce que le nord est également truffé de tunnels. C'est pourquoi Washington tente une médiation en demandant au Hezbollah de s'éloigner de 10 km de la frontière afin de créer une zone tampon qui permettrait à 60 000 Israéliens vivant au sud de la frontière de rentrer chez eux. Ils vivent dans des abris et des hôtels depuis un an et l'approche de la rentrée scolaire ne leur permet pas d'attendre plus longtemps. Il en va de même du côté libanais. La région est une véritable poudrière, il suffit d'une étincelle ou d'une erreur pour qu'elle explose.

L'assassinat du chef du Hamas, Haniye, qu'Israël n'a pas revendiqué, mais dont peu d'observateurs doutent, semble plus complexe. Haniye est mort à Téhéran alors qu'il assistait à l'investiture du nouveau président de la République islamique, ce qui met l'Iran dans une position très délicate parce qu'il était un invité officiel, parce que cela révèle de graves lacunes en matière de sécurité, parce qu'il est mort dans une résidence appartenant aux gardiens de la révolution et gardée par eux, qui ont été incapables de protéger leur invité et se sont ridiculisés devant le monde entier, et parce que cela complique la tâche du nouveau président Pezeshkian, réputé "modéré", qui souhaite reprendre des contacts indirects avec les États-Unis sur la question du nucléaire. Sur le front de Gaza, la mort de Haniye a fait disparaître le principal négociateur pour la libération des otages israéliens toujours détenus par le Hamas. Son remplaçant est Yahia Sinwar, architecte de l'attaque terroriste du 7 octobre, chef clandestin de la lutte armée à Gaza, beaucoup plus radical que Haniye et proche allié de l'Iran. Le proverbe espagnol "Si no quieres caldo, ¡taza y media !" semble s'appliquer ici.

Il semble parfois qu'Israël veuille provoquer une guerre avec l'Iran (en y entraînant les Etats-Unis) et rendre impossible la paix à Gaza, quitte à torpiller les négociations pour la libération des otages, car il est bien connu que Netanyahou place la destruction du Hamas et la victoire totale à Gaza avant son propre retour au pays. Je ne me lasse pas de le répéter, il n'y aura pas de sécurité pour Israël sans justice pour les Palestiniens.

Il suffit d'une étincelle. 

Jorge Dezcallar. Ambassadeur d'Espagne