Beaucoup d'argent a été distribué en 2022 et le sera encore plus en 2023

Un total de 1 500 milliards de dollars, ou 1 560 000 000 000 si vous préférez, a été distribué en dividendes à l'échelle mondiale. C'est le chiffre compilé par la société internationale de gestion d'actifs Janus Henderson, qui indique un niveau jamais atteint auparavant dans la rémunération des actionnaires de toutes les sociétés cotées en bourse, après avoir payé les impôts correspondants et escompté le chapitre très augmenté des nouveaux investissements. Il s'agit d'un indice qui indique quels sont les secteurs les plus prospères de l'économie mondiale et quels sont les grands acteurs qui dominent un monde globalisé dans lequel il est désormais pratiquement impossible d'opérer dans des espaces nationaux délimités par des réglementations purement locales.

Les confinements et les restrictions pendant la pandémie ont entraîné une augmentation substantielle de l'épargne, qui a ensuite été canalisée vers les investissements et la rentabilité des entreprises qui ont dû faire face à l'explosion de la consommation qui a suivi.

La crise énergétique a une fois de plus placé le secteur des hydrocarbures au premier plan de la rentabilité pour les actionnaires, et donc de la rémunération des actionnaires des grandes compagnies pétrolières et gazières. Avec le secteur financier, elles sont les moteurs des plus grandes capitalisations boursières. Janus Henderson chiffre à 66 % l'augmentation des dividendes versés en 2022 par rapport à 2021, bénéfices ordinaires et extraordinaires compris.

Pour les banques, l'augmentation globale de la rémunération des actionnaires représente 25% du total. Rappelons qu'après avoir gelé les dividendes pendant la pandémie, la Banque centrale européenne (BCE) a levé cette restriction, permettant au secteur de se redresser, ce qui a par conséquent renforcé sa capacité de prêt.

La générosité du rendement du capital est également un paramètre considérable en termes de force des secteurs et des entreprises, qui augmentent ou diminuent leur réputation précisément sur la base de cet indice. À cet égard, aucune multinationale de l'UE ne figure parmi les géants du classement, dont les places sont partagées entre les États-Unis et la Chine, bien que la première place soit occupée par la société minière anglo-australienne BHP, qui dépasse l'autre géant minier, Rio Tinto. Le reste du tableau d'honneur est occupé par la compagnie pétrolière brésilienne Petrobras, les sociétés américaines Microsoft, JPMorgan Chase, Johnson & Johnson et Apple, et la société de financement immobilier China Construction, secondée par le géant des télécommunications China Mobile. Parmi les actionnaires européens les plus généreux figurent deux entreprises du secteur de l'énergie : le français TotalEnergies et le norvégien Equinor.

Autre aspect souligné par le rapport Henderson, publié par l'AFP, des distributions record en dollars ont été effectuées aux Etats-Unis, au Canada, au Brésil, en Chine, en Inde et à Taiwan, suivies par des distributions en euros en France et en Allemagne, en yens au Japon et en dollars australiens en Australie.

Les géants pétroliers américains Chevron et Exxon ont profité de leurs importantes distributions de dividendes pour se lancer dans des rachats massifs d'actions, tandis que les sociétés financières Wells Fargo, Morgan Stanley et Blackstone, notamment, ont vu leur capitalisation augmenter fortement.

Les auteurs du rapport prévoient un ralentissement de la distribution mondiale des bénéfices d'ici à 2023, ce qui n'est pas incompatible avec le fait qu'ils prédisent également qu'ils vont à nouveau battre des records. Ils imputent ce ralentissement à l'inflation, à la hausse continue des taux d'intérêt et aux risques géopolitiques découlant de la guerre en Ukraine, de la tension croissante dans le golfe Arabo-Persique, ainsi que de la hausse de la température politique dans tout l'arc du Pacifique occidental.

Évidemment, à la lumière de ce rapport, la vieille controverse sur la relation entre le capital et le travail a refait surface, un débat qui a tendance à la caricature et à la simplification excessive, mais que les dirigeants mondiaux ne pourront pas éviter. Il s'inscrira en tout cas dans la nouvelle société qui se dessine déjà, dans laquelle l'intelligence artificielle sera déterminante dans le destin qui attend l'humanité.