Israël riposte au Liban et en Syrie

Les yeux étaient tellement rivés sur la guerre à Gaza que l'on n'a pas prêté attention au harcèlement quotidien des villes israéliennes par la milice pro-iranienne du Hezbollah, près de la frontière israélienne avec le Liban et la Syrie.
La cadence des missiles du Parti de Dieu - c'est ce que représente le Hezbollah, dirigé par l'ayatollah Hassan Nasrallah - a augmenté depuis le début de l'année, tandis qu'Israël répondait en avertissant que s'il décidait de riposter, il le ferait avec une force énorme, laissant entendre que la destruction à laquelle il soumettrait le sud du Liban meurtri pourrait égaler, voire dépasser, les décombres qu'il est en train de transformer dans la bande de Gaza meurtrie.
Israël a commencé à mettre sa menace à exécution vendredi en intensifiant ses bombardements de représailles contre la milice chiite, dans le cadre de l'opération israélienne la plus meurtrière depuis trois ans. L'attaque s'est concentrée sur un dépôt de missiles et un centre d'entraînement voisin, tous deux situés près de l'aéroport international d'Alep, autrefois l'un des joyaux urbains de la Syrie et l'une des principales sources de revenus touristiques du pays.
Le bombardement, qui a fait au moins 42 morts, dont 36 militaires syriens et six miliciens du Hezbollah, et des dizaines de blessés, selon l'Observatoire syrien des droits de l'homme, a également touché des usines d'armement à al-Safira et d'autres installations militaires à Kafr Joum.
Il s'agissait en fait de la 29e opération de représailles israélienne depuis le début de l'année, mais son ampleur et le nombre de victimes dépassent de loin les précédentes.
Les usines attaquées, bien qu'appartenant nominalement aux forces armées syriennes, étaient sous le contrôle de milices et de conseillers envoyés, soutenus et financés par l'Iran, qui n'a pas ouvertement admis un tel contrôle, y compris sur le Hamas, depuis le massacre déclenché par ce dernier le 7 octobre, opération terroriste qui a fait 1 200 morts, plus de 3 000 blessés et 240 kidnappés, dont quelque 123, morts ou vivants, sont toujours emprisonnés dans les souterrains de Gaza.
Comme on pouvait s'y attendre, cette contre-attaque israélienne fait monter la température dans tout le Moyen-Orient et nous rapproche du débordement redouté de la guerre de Gaza dans des limites indéfinies, mais effrayantes par leur ampleur.
L'opération, clairement décidée par le Premier ministre Benjamin Netanyahu, relâche la pression exercée sur lui et son gouvernement tant par les familles des otages restants que par les nombreuses institutions israéliennes et internationales qui les soutiennent, et contrecarre également les exigences des États-Unis, qui ont demandé à Israël de ne pas lancer l'opération finale annoncée sur Rafah, au sud de Gaza, "à moins de disposer d'un plan bien défini d'évacuation de la population palestinienne qui y est confinée et qui empêcherait la mort massive de civils".
Elle excite également l'Iran lui-même, qu'il ne se lasse pas de rendre responsable de la tension dans toute la région, en exigeant que l'ensemble de la communauté internationale agisse "avant qu'il ne soit trop tard". A cet égard, le porte-parole des affaires étrangères du régime théocratique iranien, Nasser Kanaani, a accusé à son tour Israël de "tenter d'étendre la guerre [de Gaza] dans une opération flagrante et désespérée".
Plus nuancées mais non moins accusatrices, les déclarations de la porte-parole de la diplomatie russe, Maria Zakharova, ont qualifié les bombardements de "catégoriquement inacceptables", avec des conséquences potentiellement très dangereuses pour l'ensemble de la région.
Le cabinet de guerre israélien, dont le ministre de la Défense, Yoav Gallant, a répondu que Tsahal "élargira son offensive contre le Hezbollah de la simple défense [des frontières] à la poursuite, afin d'anéantir toutes les niches à partir desquelles il opère, tant à Beyrouth qu'à Damas et plus loin encore".
Les services de renseignement israéliens ont identifié plus de 4 500 cibles du Hezbollah au Liban et en Syrie. Il en a déjà frappé 1 200 depuis le début de la guerre de Gaza.
À peine l'annonce de M. Gallant faite, les États-Unis ont réaffirmé qu'ils maintiendraient les livraisons d'armes à Israël, un soutien qui montre que, quelles que soient les divergences entre le président Joe Biden et Benjamin Netanyahu, l'alliance de fer américano-israélienne demeurera intacte.