Comment les nouvelles réformes fiscales entendent soutenir l’industrialisation en Côte d’Ivoire

Les nouvelles dispositions – entrées en vigueur le 2 janvier dans le cadre de l’annexe fiscale 2020- introduisent une série d’exemptions fiscales et de suspensions de taxes, ainsi que de nouveaux prélèvements et une hausse de certains taux d’imposition existants.
Parmi les 29 mesures on peut notamment citer le remboursement des crédits de TVA (taxe sur la valeur ajoutée) pour les activités précédant le stade industriel. La loi prévoit également d’accorder des avantages fiscaux aux entreprises qui transforment des produits agricoles sur le sol ivoirien.
A titre d’exemple, les entreprises de transformation élémentaire de produits agricoles en produits finis, qui exercent par exemple des activités de torréfaction du café, des noix de cajou ou des fèves de cacao, peuvent désormais bénéficier d’avantages qui étaient jusqu’alors réservés à des entreprises exerçant des activités de transformation plus élaborées.

Ces réformes s’inscrivent dans le cadre d‘une stratégie nationale plus vaste de transformation de l’économie ivoirienne, qui vise une industrialisation accrue par le biais d’une transition structurelle.
Dans le cadre du Plan National de Développement 2016-2020, le gouvernement entend porter la participation du secteur industriel au PIB à 40 % d’ici la fin de l’année. A l’heure actuelle, son taux est d’environ 30 %.
Afin de renforcer les capacités industrielles et la compétitivité du pays, les autorités ivoiriennes se sont employées à attirer des investissements directs étrangers en misant sur la création de nouvelles zones industrielles.
D’autres mesures, tel que le Programme National de Restructuration et de Mise à Niveau, visent à accroître la compétitivité des petites et moyennes entreprises (PME) dans le secteur. De 2014 à l’an dernier, le programme, doté d’un budget de 152 milliards de francs CFA (256,4 millions de dollars), a mis en place des missions de formation et d’assistance techniques à destination des PME du secteur manufacturier.

L’agriculture joue un rôle clé dans la transition industrielle ivoirienne et les pouvoirs publics cherchent à doper la valeur du secteur en développant l’agro-industrie.
Si l’agriculture constitue le premier secteur économique en Côte d’Ivoire – la production de cacao représente à elle seule 40 % des recettes d’exportation et fait vivre 2 millions de petits exploitants – le pays reste extrêmement dépendant des exportations de matières premières brutes, et passe à côté d’une grande partie de la valeur ajoutée liée à la transformation.
Afin de remédier à la situation, les autorités ont ébauché des plans dans le but d’accroître de manière significative le taux de transformation nationale de cacao et de noix de cajou et de faire passer celui-ci d’environ 10 % en 2019 à 50 % en 2020.
Ces derniers sont menés à bien au moyen d’investissements du secteur privé. Au mois de mars dernier, le fabricant suisse de chocolat et de produits dérivés du cacao Barry Callebaut a inauguré une nouvelle unité de transformation sur son site Zone 4C Société Africaine de Cacao (SACO) à Abidjan. L’unité de broyage, qui fait partie d’un investissement total de 30 milliards de francs CFA (50,4 millions de dollars), permettra à la SACO d’augmenter ses capacités de transformation de la fève de cacao de 40 % d’ici 2022.
Ces projets interviennent à l’heure où la Côte d’Ivoire et le Ghana s’emploient à garantir des revenus plus élevés aux planteurs de cacao par le biais de l’adoption d’un nouveau mécanisme de fixation des prix.
En août dernier, il a été annoncé que les pays allaient instaurer un prix plancher de 2 600 dollars la tonne pour les ventes de fèves de cacao, à compter de la saison 2020/2021.
Cette mesure vise à répondre au déséquilibre perçu entre les revenus des planteurs et les profits réalisés par les grands négociants de matière première, tout en protégeant les planteurs des fluctuations négatives des prix des fèves.

Outre les segments industriel et agro-industriel, les nouvelles dispositions fiscales entendent également avoir un impact positif sur le chômage des jeunes.
Avant la réforme, seules les entreprises embauchant des jeunes en contrat à durée indéterminée pouvaient prétendre à des exonérations fiscales. La nouvelle loi étend quant à elle ces avantages fiscaux aux entreprises concluant des contrats à durée déterminée avec de jeunes employés.
Malgré un taux de chômage officiel peu élevé, de l’ordre de 2,8 %, la Banque Mondiale note que le secteur informel constitue près de 90 % de la main d’œuvre, ce qui signifie que le salaire minimum et autres avantages sociaux ne sont garantis que pour une faible proportion d’actifs.
Il est donc à espérer que ces mesures incitatives feront évoluer à la hausse le nombre de jeunes actifs employés dans le système formel.