Les nouvelles réglementations de l'UE en matière d'émissions « obligent » Maersk à renoncer à une escale dans le port d'Algésiras
La route de la compagnie maritime qui relie l'Inde à la côte est des États-Unis fera escale dans le port marocain de Tanger Med

La compagnie danoise Maersk, l'une des principales compagnies de transport maritime au monde, a décidé de renoncer à l'escale au port d'Algésiras de son service MECL, qui relie l'Inde à la côte atlantique des États-Unis.
À la place, les navires de Maersk feront escale dans le port marocain de Tanger Med, l'un des ports les plus prospères de la Méditerranée, qui a été classé troisième dans le classement mondial des performances portuaires en 2024, établi par la Conférence des Nations unies sur le commerce et le développement, avec 159,6 points.
Nouvelle route
Selon le site web de la compagnie maritime, « pour améliorer les produits entre l'Inde et l'Amérique du nord, le service MECL ajoutera une escale à Mundra, en Inde, et cessera en même temps de faire escale à Algeciras lors du voyage vers l'ouest ».
Selon Maersk, ce changement d'itinéraire permettra de réduire de cinq jours en moyenne le trajet entre l'Inde, le Pakistan et le Moyen-Orient, et la côte est des États-Unis.
La nouvelle route sera configurée comme suit : Jebel Ali (Émirats arabes unis) - Mundra - Pipavav - Nhava Sheva (tous trois en Inde) - Salalah (Oman) - Newark - Charleston - Savannah - Houston - Norfolk - Newark (États-Unis) - Tanger Med (Maroc) - Salalah.
Maersk a également confirmé que le premier navire à naviguer sur cette nouvelle route sera le Maersk Atlanta 509W, qui partira du port indien de Mundra le 24 février.

Dépassement de coûts
La nouvelle route ne touchera aucun port européen, ce qui laisse penser que l'objectif de Maersk en optant pour l'escale Tanger Med est d'éviter les coûts engendrés par le nouveau système d'échange de quotas d'émission de l'Union européenne (EU ETS).
Ce nouveau système contrôle les émissions de CO2 du transport maritime dans l'Union européenne et obligera tous les navires faisant escale dans les ports européens à payer des quotas d'émission.
Selon une estimation du cabinet de conseil IRP Engineering, ce coût s'élève à environ 160 000 euros par navire, qui s'ajoutent aux autres frais qu'ils doivent payer pour chaque escale. Cette augmentation des coûts oblige les compagnies maritimes à les répercuter sur leurs clients.
D'ailleurs, certaines voix se sont déjà élevées pour critiquer les réglementations européennes en matière d'émissions, qui entraînent un énorme désavantage concurrentiel pour des ports comme Algésiras, au profit d'autres situés en dehors du territoire de l'Union européenne, comme Tanger Med.

En 2023, certaines petites compagnies maritimes ont choisi de ne plus faire d'escales dans les ports de l'UE, au profit d'autres ports britanniques comme Londres ou Southampton.
Au début du mois de décembre dernier, le ministre espagnol des transports, Óscar Puente, avait déjà mis en garde, lors d'une réunion avec ses homologues de l'UE, contre ce désavantage concurrentiel et avait demandé à la Commission européenne de réviser le système d'échange de quotas d'émission afin d'éviter que les ports européens ne soient désavantagés.
Algésiras et Tanger Med
L'émergence du port marocain de Tanger Med dans le commerce maritime international a été fulgurante : en quelques années, il a réussi à se positionner comme le premier port de la Méditerranée et le troisième du monde, grâce à des infrastructures de classe mondiale et à une situation géographique privilégiée.
Par ailleurs, l'offensive des Houthis yéménites sur le trafic maritime en mer Rouge est un facteur favorable pour les ports situés sur le continent africain, puisqu'une partie des routes qui passaient par le canal de Suez sont désormais détournées vers l'Afrique australe, via le cap de Bonne-Espérance, et longent les côtes de l'Afrique de l'ouest avant d'atteindre l'Europe.

Quoi qu'il en soit, l'activité de Tanger Med s'est multipliée de manière exponentielle ces dernières années. Pour donner une idée de la taille du port marocain, ses chiffres pour 2023 (dernier exercice complet publié) révèlent un trafic de 8,6 millions de conteneurs ; 2,7 millions de passagers ; 578 446 véhicules de tourisme ; 477 993 véhicules industriels ; 16 900 navires amarrés ; et un tonnage total de 122 millions de tonnes.
En revanche, le port espagnol d'Algésiras a enregistré entre janvier et novembre 2024 un trafic de 4,38 millions de conteneurs (TEUS) ; 5,5 millions de passagers ; 1,2 million de véhicules de tourisme ; 462 000 véhicules commerciaux ; 29 071 navires ; et un tonnage total de 95,6 millions de tonnes.
Le président de l'autorité portuaire d'Algésiras, Gerardo Landaluce, devrait faire une déclaration sur l'impact de la législation européenne sur les émissions et la décision de Maersk lors de sa présentation à la presse le 16 janvier, pour présenter les chiffres d'activité pour 2024.