Les "Papiers de Pandore" éclaboussent 330 hauts fonctionnaires et hommes politiques dans 91 pays différents

Jusqu'à 35 chefs d'État et anciens chefs d'État - dont 14 en Amérique latine - ont été impliqués dans la publication des "Papiers Pandora". 600 journalistes de 117 pays ont été impliqués dans la fuite de près de 12 millions de fichiers provenant de 14 cabinets d'avocats spécialisés dans les transactions offshore. Le Consortium international des journalistes d'investigation (ICIJ), qui a mené cette enquête, est à l'origine de la publication des "Panama Papers". Cette nouvelle affaire concerne 15 dirigeants internationaux et 600 ressortissants espagnols, dont Josep Guardiola, Julio Iglesias et Miguel Bosé.
L'enquête, considérée comme l'une des plus grandes - sinon la plus grande - collaboration journalistique de l'histoire, a été menée par des journalistes du "Washington Post" (États-Unis), du "Guardian" (Royaume-Uni), du "Monde" (France) et de "La Nación" (Argentine), entre autres. En Espagne, El País et La Sexta ont été chargés d'analyser la documentation à la recherche d'individus et d'entreprises qui ont tenté de tirer parti d'un des systèmes juridiques les plus opaques de la planète. Plus de 750 sociétés offshores liées à des personnes et des adresses sur le territoire espagnol, ainsi que plus de 50 cas liés à des affaires judiciaires qui n'ont pas encore été résolues.

Les noms qui ont été révélés ces dernières heures ne sont abonnés à aucun territoire. Des personnalités du monde entier sont éclaboussées par la publication de ces "Papiers de Pandore". Le ministre de l’Économie du Brésil, Paulo Guedes, l'ancien premier ministre britannique Tony Blair, l'ancien directeur général du Fonds monétaire international (FMI), Dominique Strauss-Kahn, le roi de Jordanie Abdullah II, le président chilien Sebastián Piñera, et même certaines personnes du cercle le plus proche du président russe Vladimir Poutine.
Les sociétés offshores ne constituent pas le problème fondamental, car elles sont légales. En fait, non seulement ils sont légaux, mais, selon Francisco Bonatti, avocat pénaliste et consultant en blanchiment d'argent, "ils sont souvent nécessaires pour les grands flux de capitaux". Il ajoute que "cette partie de l'économie offshore n'est pas seulement légale, mais dans l'économie actuelle, qui est délocalisée et mondialisée, elle est nécessaire". Le vrai problème avec ce type de société est lorsqu'elle n'est pas déclarée aux autorités fiscales du pays dans lequel elle réside.

Dans de nombreux cas, l'objectif de ce type de société est de les créer dans des juridictions très opaques afin d'obtenir des charges fiscales très faibles et, surtout, avec une grande confidentialité. Normalement, lorsque ce type d'action est entrepris, les entreprises n'ont aucun type d'activité dans ce territoire, ni employés ni bureaux, car l'intention est d'exempter le propriétaire de l'entité des obligations fiscales. Toutefois, comme indiqué ci-dessus, les sociétés offshores ne sont pas nécessairement illégales. En effet, selon une étude réalisée en 2017 par Annette Alstadaeter (Université norvégienne des sciences de la vie), Niels Johannesen (CEBI, Université de Copenhague) et Gabriel Zucman (UC Berkeley et NBER), 10 % de l'ensemble du produit intérieur brut mondial est détenu par de telles entreprises.

L'Union européenne pointe également du doigt ces types d'entités qui, selon les données de la Commission européenne, sont à l'origine de 46 milliards d'euros de pertes fiscales. L'OCDE, pour sa part, estime que près de 10 000 milliards d'euros sont stockés dans des sociétés offshores. Christoph Trautvetter, expert fiscal, a expliqué pourquoi les organisations européennes et internationales critiquent ces actions, malgré la légalité dans laquelle elles peuvent être établies : "Les lois qui les permettent n'ont pas été adoptées démocratiquement, mais créées sous l'influence d'une industrie d'avocats et de prestataires de services qui profitent du secret des pays où ils opèrent et où c'est légal".
Jets privés, yachts, hôtels particuliers ou encore œuvres signées par Picasso ou Banksy font partie des biens cachés dans les paradis fiscaux répertoriés dans les "Papiers de Pandore". Le facteur différentiel qui rend possible tout cet écheveau de mouvements financiers, ce sont les cabinets d'avocats. Ils représentent le pilier fondamental qui permet au flux d'argent hors des circuits conventionnels de fonctionner. Entre les banques et les cabinets d'avocats, qui servent d'intermédiaires, il serait pratiquement impossible de transférer de l'argent dans des endroits comme les îles Vierges ou les Bahamas.