La controverse olympique au Conseil de sécurité de l'ONU refroidit les relations entre l'Algérie et la Russie
Le sexe de l'athlète Imam Khalif a été utilisé comme arme par la Russie contre la France, ce qui a indigné le représentant de l'Algérie

La polémique autour de la boxe féminine aux Jeux Olympiques de Paris a débordé au Conseil de sécurité des Nations unies et risque de ternir les relations diplomatiques "historiques" entre l'Algérie et l'un de ses alliés, la Russie.
Ces relations semblent se refroidir depuis quelques semaines, en raison des intérêts contradictoires des deux pays dans la région du Sahel.
L'affaire Khalif
Personne ne s'attendait à ce que la controverse survienne sur fond de sport, un sujet dont la Russie a profité pour s'en prendre à la France, organisatrice des Jeux olympiques de 2024, et, par extension, à l'Occident.
Tout a commencé lorsque le représentant adjoint de la Russie au Conseil de sécurité de l'ONU, Dmitry Polyansky, a critiqué le monde occidental et en particulier la France, organisatrice des Jeux olympiques, pour ce qu'il considère comme un "manque de respect pour les femmes et une manipulation des valeurs olympiques".

Polyansky s'en est également pris au Comité international olympique, dont il a qualifié les actions de "dégoûtantes", et a dénoncé la "fraude" que constitue la présence de boxeuses comme Imam Khalif et la Taïwanaise Lin Yu-Ting, toutes deux dotées de chromosomes masculins, dans la compétition féminine, où elles remportent leurs combats à une écrasante majorité face à leurs rivales.
Dans son discours, le représentant russe a accusé les pays occidentaux de monopoliser le mouvement olympique et d'imposer l'agenda LGBT de manière "agressive" : "Aux Jeux olympiques de Paris, les boxeuses sont exposées à la violence en public par des athlètes qui n'ont pas passé les tests hormonaux menés par la Fédération internationale de boxe et qui, selon la logique, sont des hommes. C'est absolument dégoûtant.
La Russie et la Fédération internationale de boxe
Le contexte de ces accusations se trouve d'une part dans la volonté de la Russie de se défausser sur l'Occident de l'exclusion de ses athlètes en raison de l'invasion de l'Ukraine, et d'autre part dans l'indignation russe face aux valeurs véhiculées lors de la cérémonie d'ouverture des Jeux Olympiques.
Une autre variable à prendre en compte est également le désintérêt du Comité olympique pour la Fédération internationale de boxe, présidée par Omar Krimlev, un proche du président russe Vladimir Poutine.
Rappelons que la Fédération internationale de boxe a refusé la participation de Khalif et de Yu-Ting à ses compétitions, car ils n'avaient pas passé les tests hormonaux auxquels les deux athlètes ont été soumis. D'ailleurs, lors des championnats du monde de l'année dernière en Inde, Khalif a été éliminé au dernier tour, tandis que Yu-Ting s'est vu retirer la médaille de bronze.
Réaction de l'Algérie
Comme on pouvait s'y attendre, l'intervention du représentant russe a suscité l'indignation de Tawfiq Koudari, représentant adjoint de l'Algérie au Conseil de sécurité de l'ONU, qui a demandé à plusieurs reprises la parole pour exprimer son étonnement face à l'amalgame fait par le porte-parole russe entre le sport et la politique.
Selon Koudari, "l'athlète algérienne est née femme, a été élevée femme et a progressé dans le sport au niveau international en tant que femme, et personne ne peut en douter. L'Algérie rejette la campagne d'intimidation et de calomnie lancée par ses adversaires, de la Fédération internationale de boxe aux élites politiques, médiatiques et financières. Cela ne fait aucun doute, sauf pour ceux qui ont un certain agenda politique".
Cette altercation au Conseil de sécurité de l'ONU pour un motif que l'on pourrait qualifier d'anecdotique met en lumière la détérioration progressive des relations diplomatiques entre la Russie et l'Algérie, entamées dans les années 50 du siècle dernier et qui étaient jusqu'à présent au beau fixe.
Les experts soulignent l'existence de divergences silencieuses entre les deux pays, causées par leurs intérêts militaires et d'armement différents au Sahel, qui ont été transférés à d'autres domaines tels que, dans le cas présent, le sport. L'Algérie a dénoncé le changement de discours de la Russie, qui semble prête à sacrifier ses relations avec l'Algérie pour attaquer l'Europe occidentale.