L'Espagne, la France et l'Allemagne ont expulsé des diplomates russes sous prétexte qu'ils constituaient une menace pour la sécurité

L'Union européenne punit la Russie diplomatiquement et judiciairement après le massacre de Boutcha

REUTERS/ZOHRA BENSEMRA - Un corps aux mains attachées avec un tissu blanc, dont les habitants disent qu'il a été abattu par des soldats russes, gît dans la rue, dans le cadre de l'invasion russe de l'Ukraine, à Bucha, en Ukraine, le 3 avril 2022. REUTERS/ZOHRA BENSEMRA

L'Union européenne réagit à l'horreur découverte dans la ville ukrainienne de Boutcha par des déclarations et des expulsions de diplomates russes. Les dirigeants européens de différentes institutions ont fait des déclarations en début de semaine pour condamner unanimement le massacre de civils aux mains des troupes russes dans l'agglomération de Kiev.

Le retrait des troupes russes début avril dans l'oblast de Kiev, résultat des pourparlers entre les gouvernements ukrainien et russe à Istanbul, a laissé place à l'avancée des forces ukrainiennes dans les villes de Boutcha et d'Irpin. Lors du passage des Ukrainiens, accompagnés des médias, les horreurs laissées par le passage de l'armée russe ont été révélées. À ce jour, on estime à 400 le nombre de morts civils dans les rues de Boutcha et d'Irpin, tandis que d'autres fosses communes ou corps cachés dans des caves sont découverts. 

L'Union européenne a réagi par l'intermédiaire de différents dirigeants, dont Josep Borrell, le haut représentant de l'UE pour les affaires étrangères, qui a condamné "dans les termes les plus forts les atrocités signalées commises par les forces armées russes dans un certain nombre de villes ukrainiennes occupées [...] nous soutenons pleinement l'enquête qui a été menée par les autorités russes sur les atrocités commises dans les villes ukrainiennes occupées [...]". Nous soutenons pleinement l'enquête lancée par le procureur de la CPI sur les crimes de guerre et les crimes contre l'humanité, ainsi que le travail de la commission d'enquête du HCDH", a ajouté Borrell dans sa déclaration, en référence à l'enquête de la CPI sur les crimes de guerre en Ukraine. 

von der leyen borrell

La présidente de la Commission, Ursula Von Der Leyen, a eu une conversation téléphonique à la mi-journée avec  Zelenski pour discuter également des "meurtres abominables découverts à Boutcha". La Commission a annoncé le lancement d'une équipe d'enquête spéciale qui travaillera avec les autorités ukrainiennes pour rassembler des preuves juridiques pouvant être utilisées dans le processus de justice internationale contre la Russie. Von der Leyen a précisé que Didier Reynders, commissaire européen à la justice, sera chargé d'élaborer la feuille de route avec le procureur général ukrainien. 

Didier Reynders, ancien ministre de la défense et vice-premier ministre belge, a accepté la tâche et a brièvement détaillé les prochaines étapes dans un fil sur son compte Twitter. 

Lors d'une conférence de presse, le porte-parole de l'UE pour les affaires étrangères, Peter Stano, a résumé la position des Vingt-sept et réaffirmé les déclarations de von der Leyen et de Borrell.

Tant Borrell que von der Leyen se rendront à Kiev dans les prochains jours, comme l'a annoncé mardi le porte-parole principal de la Commission européenne, Eric Mamer. Ce voyage, prévu pour la fin de la semaine, a pour but de rencontrer  Zelenski et d'observer par eux-mêmes la situation dans la ville. Les présidents et premiers ministres des pays du groupe dit de Visegrad se sont déjà rendus dans la capitale ukrainienne en mars, mais la visite de Borrell et de von der Leyen est la visite européenne de plus haut niveau. 

Certains États membres de l'UE ont déjà pris des mesures à la suite de la révélation des horreurs de Bucha. Les premiers ont été la France et l'Allemagne, dont les ministres des affaires étrangères, Le Drian et Baerbock, ont annoncé respectivement l'expulsion de 30 et 40 diplomates et personnels des ambassades russes de leurs pays.

"La France a décidé cet après-midi d'expulser de nombreux personnels russes à statut diplomatique stationnés en France dont les activités sont contraires à nos intérêts de sécurité. Cette action s'inscrit dans une démarche européenne", peut-on lire dans le communiqué du Quay d'Orsay. 

bucha masacre

Mardi 5 à midi, le ministère français des Affaires étrangères a convoqué l'ambassadeur russe à Paris, Alexey Meshkov. Une heure plus tard, il a été annoncé que le parquet antiterroriste de Paris ouvrait une enquête sur des allégations de crimes de guerre en Ukraine.

Toujours en France, le secrétaire d'État français aux affaires européennes, Clément Beaune, a annoncé mardi matin, dans une interview à Radio France Internationale, que l'Union européenne prévoit d'activer un nouveau train de sanctions contre la Russie le mardi 6 avril. Clément Beaune a mentionné que les sanctions affecteraient les importations et le commerce extérieur russes, et dit vouloir un "embargo sur le pétrole et le charbon russes", alors qu'il est plus prudent sur la question du gaz. "Une question qui doit être abordée à plus long terme", comme le rapporte EFE. 

albares ministro

L'Espagne a rejoint la vague d'expulsions en fin de matinée mardi. Le ministre des Affaires étrangères José Manuel Albares, ainsi que la porte-parole du gouvernement, ont confirmé les rumeurs que la presse nationale propageait depuis la veille. Selon le ministre des Affaires étrangères, l'ordre d'expulsion d'environ 25 diplomates et travailleurs de l'ambassade de Russie à Madrid prendra effet dans les prochaines heures. "La Russie donne une réponse symétrique, comme il est d'usage dans la diplomatie. Ce qui n'est pas symétrique, ce sont les raisons pour lesquelles les diplomates sont expulsés. Il n'y a pas de symétrie là-dedans", a ajouté Albares lors de la conférence de presse.   

La Russie a démenti la version européenne et ukrainienne des événements, les accusant de mettre en scène un faux montage. Malgré cela, les images satellites dévoilées par le New York Times révèlent l'apparition de cadavres et de tombes dans les rues de Buca. Les images de la société Maxar Technologies sont datées du 11 mars et montrent déjà des cadavres gisant dans la ville.