Menace de conflit armé dans le Caucase du Sud

El presidente de Azerbaiyán, Ilham Aliyev - AFP/KENZO TRIBOUILLARD
AFP/KENZO TRIBOUILLARD - Le président de l'Azerbaïdjan, Ilham Aliyev, pose pour une photo officielle avant une réunion avec le Premier ministre arménien et le président du Conseil européen au Conseil européen de Bruxelles, le 14 mai 2023

Admirateur et disciple de Vladimir Poutine, Ilham Aliyev, le dictateur déguisé qui dirige l'Azerbaïdjan depuis vingt ans, veut aussi étendre son domaine territorial et stratégique. 

Il y a quelques semaines, il a réussi à prendre le contrôle de l'enclave contestée du Haut-Karabakh en passant par l'Arménie et a déjà menacé de faire de même avec le corridor de Zangezur, moins connu mais non moins contesté, également dans le Caucase du Sud en proie à des troubles.

Le corridor de Zangezur est un passage étroit entre les frontières de l'Arménie, de l'Azerbaïdjan, de la Turquie et de l'Iran, où se trouve la petite ville ferroviaire de Meghiri. À l'époque soviétique, où les incidents frontaliers les plus insignifiants sur le territoire qu'il couvre étaient drastiquement étouffés, le corridor a déjà été le théâtre de quelques incidents qui se sont terminés en 1993 par la fermeture de la voie ferrée reliant la région.

Dans un rapport détaillé récemment publié par le Washington Post, la revendication azerbaïdjanaise sur le corridor serait, sans surprise, soutenue par la Russie. L'Azerbaïdjan, qui abritait à l'époque de l'URSS l'un de ses arsenaux nucléaires, est, depuis l'éclatement de l'URSS, parmi les pays caucasiens qui ont accédé à l'indépendance, celui qui entretient les meilleures relations avec Moscou.

Selon le journal, l'urgence de prendre le contrôle d'une enclave de peu d'intérêt, dont la voie ferrée est hors service, en profitant de la faiblesse militaire de l'Arménie, répond non seulement aux ambitions du despote Aliyev, mais aussi au besoin de Poutine de trouver des débouchés pour le gaz et le pétrole, très limités après les sanctions économiques appliquées en réponse à l'invasion de l'Ukraine il y a deux ans.

Le conflit qui menace d'éclater à ce stade de grave déstabilisation mondiale touche plusieurs pays en plus de ceux qui se trouvent à la frontière. L'Iran ne semble pas vouloir voir la frontière avec l'Arménie modifiée, alors que l'autre pays le plus concerné, la Turquie, serait prêt à l'accepter. Les relations entre l'Arménie chrétienne et la Turquie musulmane ne sont généralement pas bonnes, et le triste souvenir de l'holocauste arménien est toujours lourd à porter. Le président turc Recep Tayyip Erdogan, en revanche, entretient de bonnes relations avec la Russie et ne s'y opposerait pas, mais y verrait aussi des avantages.

Le gouvernement de Bakou célèbre son succès dans le Haut-Karabakh et garde le silence sur ses projets concernant le corridor de Zangezur, mais l'ambassadeur à Washington n'a pas démenti la nouvelle, il l'a simplement minimisée en assurant que l'Azerbaïdjan n'avait pas d'"objectifs militaires" à l'esprit, ce qui est interprété comme une tentative d'incorporer le corridor de manière pacifique. Nous devrons attendre et voir.