L'Inde, une puissance mondiale

El primer ministro de la India, Narendra Modi, el presidente de Estados Unidos, Joe Biden, y el príncipe heredero y primer ministro de Arabia Saudí, Mohamed bin Salman, se dan la mano antes del inicio de una sesión de la cumbre del G20 en Nueva Delhi, el 9 de septiembre de 2023 - PHOTO/AFP/EVELYN HOCKSTEIN/POOL/AFP
Le Premier ministre indien Narendra Modi, le président américain Joe Biden et le prince héritier et Premier ministre saoudien Mohammed bin Salman se serrent la main avant le début d'une session du sommet du G20 à New Delhi, le 9 septembre 2023 - PHOTO/AFP/EVELYN HOCKSTEIN/POOL/AFP.
Du 19 avril au 4 juin, date à laquelle les résultats seront officiellement annoncés, l'Inde organise ses élections générales en sept phases successives, ce qui représente l'effort économique et logistique le plus colossal et le plus coûteux pour ce qui est considéré comme la plus grande démocratie du monde. 

970 millions d'électeurs ont voté pendant les 44 jours du processus électoral pour élire les 543 membres du Lok Sabha, la chambre basse du Parlement indien, et donc le premier ministre du pays le plus peuplé et le plus peuplé du monde, qui rivalise actuellement avec la Chine pour la suprématie sur le continent asiatique. 

Ayant établi sa démocratie presque simultanément à son indépendance de l'Empire britannique en 1947, l'Inde a réussi à la maintenir intacte malgré ce que certains observateurs qualifient de distorsions, comme l'avantage dont jouit le parti au pouvoir dans la collecte et la distribution des fonds publics par rapport aux autres formations politiques. Mais cette fois, après trois quarts de siècle de régime démocratique ininterrompu, l'Inde aborde les élections générales en tant que puissance mondiale. Elle a atteint ce statut après les deux mandats du Premier ministre Narendra Modi, qui se caractérisent par trois traits principaux : un nationalisme de plus en plus identifié à la religion hindoue majoritaire, une croissance économique très forte et un équilibre marqué dans ses relations internationales. 

Narendra Modi bouscule le vieux cliché d'un pays fascinant, mais rongé par la misère et les conflits de castes. La persistance de coutumes et de traditions prétendument obsolètes n'a pas empêché le pays de devenir, entre autres, la plus grande usine d'ingénieurs informaticiens du monde, qui non seulement nourrissent les talents des grandes entreprises des États-Unis ou du Royaume-Uni, mais ont aussi permis une avancée colossale des industries technologiques indiennes, couronnée par des étapes importantes comme la pose réussie d'un véhicule sur la lune, qui lui a permis de rejoindre le club des grands dans la course à l'espace. 

A la tête du Bharatiya Janata (Parti du Peuple), Narendra Modi, 73 ans, brigue un troisième mandat qui, s'il est confirmé, le mettrait au même niveau que le premier chef de gouvernement de l'Inde, Jawaharlal Nehru. Face à lui, un Parti du Congrès affaibli, mené par Mallikarjun Kharge et Rahul Gandhi, ce dernier héritier de la saga qui a dominé la scène politique du pays pendant cinquante ans. 

Compte tenu de ses faibles chances dans les urnes, le Parti du Congrès a conclu des alliances avec plusieurs partis régionaux, dont le All India Trinamool Congress et l'hétéroclite National Alliance for Inclusive Development (Alliance nationale pour un développement inclusif). Il ne semble cependant pas qu'un tel conglomérat puisse déloger Modi, accusé de vouloir recentraliser fortement le pays ainsi que d'abolir la laïcité, inscrite dans la Constitution, au profit d'un nationalisme hindou qui pénalise les minorités religieuses du pays, notamment les musulmans et les chrétiens, qui ont subi des persécutions plus ou moins intenses tout au long de la décennie de pouvoir du BJP.

Quoi qu'il en soit, les cinq prochaines années seront cruciales pour l'Inde et l'Asie dans son ensemble. La lutte avec la Chine semble devoir s'intensifier, notamment en ce qui concerne la domination de l'Himalaya et le contrôle de l'océan Indien. Le gouvernement Modi de New Delhi a opéré un rapprochement fondamental avec les États-Unis, qui lui accordent à leur tour un traitement préférentiel en tant que contrepoids à une Chine qui s'est imposée comme l'adversaire mondial de la superpuissance américaine. Le chef du gouvernement indien a également su tirer parti des sanctions internationales contre la Russie de Poutine, en acheminant vers l'Europe, avec d'énormes marges bénéficiaires, du pétrole que les pays de l'UE ne pouvaient pas acheter ouvertement à Moscou.  

Intégrée au noyau des BRICS et du G20, dont le dernier sommet en Inde même a servi de meilleure vitrine à Modi, l'Inde de Modi s'attache aussi à renforcer l'idéologie autant ou plus que l'économie, consciente que la polarisation croissante du monde laissera peu de place à l'ambiguïté et nécessitera des convictions fortes pour se mobiliser avec ou contre qui que ce soit.