Le Maroc se rapproche de l'autosuffisance énergétique avec de nouveaux projets gaziers

Le pays mise sur deux gisements qui pourraient réduire sa dépendance à l'égard des importations d'énergie 
Barco cisterna «Lalla Fatma N'Soumer» llegando para entregar GNL (Gas Natural Licuado) al muelle de carga de la terminal de Cavaou en Fos-sur-Mer - AFP/ CLEMENT MAHOUDEAU
Le pétrolier « Lalla Fatma N'Soumer » arrive pour livrer du GNL (Gaz Naturel Liquéfié) au quai de chargement du terminal de Cavaou à Fos-sur-Mer - AFP/ CLEMENT MAHOUDEAU

Le Maroc franchit une étape importante dans la réduction de sa dépendance énergétique avec le développement de deux ambitieux projets de production de gaz naturel, dont le potentiel global est estimé à plus de 28 milliards de mètres cubes. Ces initiatives, actuellement à un stade avancé, pourraient amener le pays à un nouveau niveau d'autosuffisance énergétique dans les années à venir.  

Comme le souligne Al Arab, le projet le plus important est mené par la société britannique Energean, qui détient une licence d'exploration dans le champ d'Anchoa, au large de la côte atlantique. Ce champ, qui constitue la plus grande découverte non exploitée du pays, possède des réserves prouvées de 18 milliards de mètres cubes de gaz. La deuxième initiative, située dans le champ terrestre de Tendrara, dans l'est du Maroc, appartient à une société minière locale, qui a récemment acquis une participation auprès de la société Sound Energy, basée au Royaume-Uni. Les ressources de ce champ sont estimées à 10,67 milliards de mètres cubes.

Malgré l'enthousiasme, les autorités marocaines restent prudentes face aux annonces des sociétés étrangères d'exploration de combustibles fossiles, car aucun de ces projets n'est encore entré dans la phase de production commerciale. Cependant, les champs d'Anchoa et de Tendrara sont considérés par le ministère de la transition énergétique et du développement durable comme les plus prometteurs pour assurer la production future de gaz.  

Plataforma de perforación Transocean Barents, en busca de gas en alta mar - AFP/ TOTAL ENERGIES
La plateforme de forage Transocean Barents à la recherche de gaz offshore - AFP/ TOTAL ENERGIES

Actuellement, la production nationale de gaz naturel du Maroc est limitée, avec seulement 100 millions de mètres cubes par an provenant de petits gisements. Le pays importe la majeure partie de ses besoins, soit environ 1 milliard de mètres cubes par an, par le biais du marché international, avec une infrastructure qui facilite les importations en provenance d'Espagne par le biais d'un gazoduc.  

Historiquement, le Maroc dépendait du gaz algérien pour la production d'électricité, notamment par le biais du gazoduc Maghreb-Europe. Cependant, la détérioration des relations diplomatiques entre les deux pays en 2021 a entraîné l'interruption des approvisionnements, ce qui a rendu encore plus urgent le besoin de disposer de ses propres sources d'énergie.

Le projet Anchovy a franchi une étape importante la semaine dernière avec le début des opérations de forage par le navire Stena Forth, a annoncé Energean. Cette phase est cruciale pour recueillir les données nécessaires à la prise de la décision finale d'investissement et au passage à la production commerciale, prévue pour 2026. Adonis Pouroulis, PDG de Chariot Energy, a souligné que des centaines de millions de dollars d'investissements seront nécessaires avec différents partenaires pour atteindre cet objectif.  

La ministra de Transición Energética y Desarrollo Sostenible de Marruecos, Leila Benali - AFP/ SIMON MAINA
Ministre marocaine de la transition énergétique et du développement durable, Leila Benali - AFP/ SIMON MAINA

Le projet Tendrara a également franchi des étapes importantes. En juin 2023, Managem, une société spécialisée dans l'extraction de métaux précieux en Afrique, a acquis une participation de 55 % dans le projet, qui couvre une superficie de 23 000 kilomètres carrés. Cette participation s'ajoute aux 20 % détenus par Sound Energy, le reste appartenant à l'Office national des hydrocarbures et des mines. Imad Toumi, PDG de Managem, a souligné que cet investissement contribuera à fournir une énergie propre au secteur industriel local, tout en renforçant la souveraineté énergétique du pays.  

La découverte d'importantes réserves de gaz dans le champ offshore d'Inzegane, au large d'Agadir, annoncée par Europa Oil & Gas en 2021, alimente également les espoirs de revenus durables du Maroc pour l'avenir. Ces réserves, qui dépassent les deux milliards de barils d'équivalent pétrole, pourraient jouer un rôle clé dans l'économie marocaine une fois que les opérations de production commenceront.  

Unidad de producción flotante (FPSO) de Energean se ve en alta mar en Israel - PHOTO/REUTERS
L'unité flottante de production (FPSO) d'Energean au large d'Israël - PHOTO/REUTERS

La consommation de gaz du Maroc devant passer de 1,1 milliard de mètres cubes l'année prochaine à 1,7 milliard à la fin de la décennie et à 3 milliards en 2040, l'augmentation de la production nationale est devenue un objectif stratégique. La ministre de la transition énergétique, Leila Benali, a récemment déclaré que le pays visait à augmenter sa production à 400 millions de mètres cubes par an dans les années à venir, contre 100 millions de mètres cubes actuellement, ce qui permettrait de couvrir 40 % de la consommation nationale.  

Dans le cadre de sa stratégie à long terme, le Maroc prévoit de moderniser ses pipelines et ses infrastructures portuaires afin de garantir un approvisionnement stable en provenance de l'étranger. En juin 2023, le ministère de la transition énergétique a signé un accord avec la Société financière internationale de la Banque mondiale pour développer une infrastructure gazière durable par le biais d'un partenariat public-privé, conformément à la feuille de route du gouvernement.

Ces efforts s'inscrivent dans le cadre du plan de transformation verte du pays, qui vise à ce que les énergies propres représentent plus de la moitié de la capacité de production d'électricité du Maroc d'ici la fin de la décennie. Avec ces projets, le pays ne se contente pas de progresser vers l'autosuffisance énergétique, il renforce également son engagement à réduire les émissions de carbone.