L'Algérie augmente son budget militaire
L'Algérie a décidé de doubler son budget militaire d'ici 2023. L'année prochaine, le gouvernement algérien allouera quelque 23 milliards de dollars au secteur de l'armement et de la défense. Cette augmentation importante sera votée par le Parlement à la fin du mois de novembre, mais elle ne fera pas l'objet d'un débat politique, comme c'est le cas pour toutes les questions de défense nationale.
Comme le rapporte Radio France Internationale (RFI), la décision d'Alger représente une augmentation de plus de 110 % en une seule année. Depuis 2004, le budget militaire de l'Algérie est d'environ 10 milliards de dollars par an. La seule exception a été en 2013, lorsque le ministère de la Défense a reçu 17 milliards de dollars du budget général et le ministère de l'Intérieur cinq milliards. Le journal français souligne également que cette forte augmentation place l'Algérie parmi les trente premiers pays au monde en termes de dépenses militaires, et l'un des plus importants en Afrique.
Avec cette mesure, l'armée algérienne cherche à se moderniser et à investir dans le renseignement militaire. À cette fin, l'Algérie envisage la possibilité de nouer des liens plus étroits avec des pays tels que la Chine, la Turquie et l'Iran dans ce domaine. Le pays d'Afrique du Nord pourrait bénéficier de l'efficacité et de la compétitivité de Pékin en matière d'armement, ainsi qu'acquérir des drones turcs et iraniens, l'une des armes au centre de la guerre en Ukraine. À cet égard, le président Abdelmadjid Tebboune a récemment eu un entretien téléphonique avec son homologue turc, Recep Tayyip Erdogan, au cours duquel tous deux ont souligné "l'excellence des relations bilatérales", selon l'agence de presse algérienne APS.
De cette manière, l'Algérie diversifierait ses sources d'armement et cesserait de dépendre de la Russie, son principal fournisseur. Le géant eurasien est également le pays le plus sanctionné au monde après son invasion de l'Ukraine en février dernier. En tant que telles, ces sanctions - dont certaines visent l'industrie militaire russe - pourraient avoir un impact sur le commerce des armes avec l'Algérie.
D'un autre côté, prendre ses distances avec la Russie pourrait calmer les voix critiques à Washington qui appellent à des représailles contre le pays maghrébin pour ses liens d'armement avec le Kremlin. Le conflit en Ukraine a également mis en évidence les limites de l'arsenal militaire de Moscou face aux armes occidentales destinées à Kiev.
Cependant, la guerre en Ukraine et les sanctions subséquentes contre la Russie ont également profité à l'Algérie. La hausse des prix des hydrocarbures, associée à des accords énergétiques entre Alger et certains pays européens cherchant à réduire sa forte dépendance à l'égard de la Russie, a gonflé les caisses de l'État algérien. "L'Algérie n'a jamais été aussi riche. La crise en Ukraine a permis à l'Algérie de remplir ses coffres", explique à RFI Emmanuel Dupuy, président de l'Institut pour la prospérité et la sécurité en Europe (IPSE).
D'autre part, cette forte augmentation des dépenses militaires pourrait également être une "couverture" pour la corruption au sein de l'institution, rapporte Al-Arab, en se basant sur des analystes algériens qui se demandent pourquoi le gouvernement a décidé d'augmenter le budget de la défense alors que d'autres secteurs ont un besoin urgent de ces fonds pour atténuer les effets de la pandémie et de la guerre en Ukraine.
Selon le journal arabe, ce changement a été justifié par le "soutien et l'expansion de l'activité diplomatique". Il est donc possible qu'Alger investisse davantage de fonds dans le soutien militaire de groupes partageant les mêmes idées, tels que le Front Polisario.
