Les élections ont eu lieu le 21 juin après deux reports

L'Éthiopie attend les résultats des élections alors que les violences se poursuivent dans le Tigré

AFP/MARCO LONGARI - Des électeurs regardent le dépouillement des bulletins de vote à l'extérieur d'un bureau de vote à Addis-Abeba, le 22 juin 2021

Cette semaine, des élections générales ont eu lieu en Éthiopie, en plein conflit entre les forces armées nationales et les milices rebelles de la région du Tigré. Bien que les élections aient eu lieu le 21 juin, les résultats n'ont pas encore été annoncés. Ces élections ont été reportées à deux reprises depuis août 2020. Le premier report était dû à la pandémie de coronavirus, et le second à des problèmes logistiques. Il s'agit également de la première élection du Premier ministre éthiopien Abiy Ahmed Ali, lauréat du prix Nobel de la paix 2019.

Le comité Nobel norvégien a décerné le prix à Abiy Ahmed pour "avoir réalisé la paix, la coopération internationale et en particulier pour son initiative décisive en vue de résoudre le conflit avec l'Érythrée voisine". Le Premier ministre éthiopien a réussi à établir des relations diplomatiques avec l'Érythrée après une longue confrontation frontalière qui a débuté en 2000. Toutefois, depuis le début de l'intervention militaire des forces nationales dans le Tigré, la communauté internationale s'est demandé s'il méritait vraiment une telle récompense.

Abiy Ahmed devrait remporter les élections en raison de la situation des autres partis politiques. L'opposition éthiopienne est très divisée et certains de ses candidats ont été interdits de se présenter et d'autres ont même été emprisonnés. De plus, avec ses actions guerrières au Tigré, il a réussi à gagner le soutien de nombreux secteurs du pays qui condamnent le Front populaire de libération du Tigré (TPLF). D'autre part, il convient de noter le faible taux de participation des citoyens. Sur les quelque 110 millions d'habitants que compte l'Éthiopie, ce qui en fait le deuxième pays le plus peuplé d'Afrique, seuls 37 millions se sont inscrits sur les listes électorales, alors que le conseil électoral en attendait 50 millions.

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Alors que les citoyens attendent les résultats, des puissances et des organisations internationales se sont exprimées sur les élections. Antony Blinken, secrétaire d'État américain, a déclaré que le processus électoral "n'a pas été libre et équitable pour tous les Éthiopiens". M. Blinken a également souligné "le contexte de grave instabilité" dans lequel se trouve le pays africain et l'arrestation de certains dirigeants politiques.

L'Union européenne a été moins sévère que Washington, appelant au "dialogue national" pour trouver des solutions pacifiques. D'autre part, un communiqué du gouvernement britannique a condamné l'emprisonnement de membres de l'opposition et le "harcèlement des représentants des médias". Comme Bruxelles, elle soutient "la transition de l'Éthiopie vers une gouvernance plus démocratique dans laquelle la population diversifiée du pays est pleinement engagée".

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En revanche, l'Union africaine a fait l'éloge des élections parlementaires éthiopiennes, affirmant qu'elles étaient "ordonnées, pacifiques et crédibles". Récemment, l'organisation panafricaine a mis en place une commission d'enquête sur les événements du Tigré. Cependant, depuis le début du conflit en novembre 2020, l'UA a soutenu le gouvernement d'Addis-Abeba, déclarant que ses actions militaires étaient "légitimes".

La guerre ne s'arrête pas malgré le processus électoral

Outre les déclarations internationales qui ont suivi le jour des élections, ces journées ont été marquées par la violence. Un jour après les élections, le 22 juin, les forces nationales ont bombardé un marché à Togoga, dans la région du Tigré. Cette attaque a fait plus de 50 morts et des centaines de blessés.

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Vendredi, un véhicule transportant trois travailleurs de Médecins Sans Frontières a été attaqué dans le Tigré. Tous les travailleurs humanitaires ont été tués, y compris la coordinatrice d'urgence espagnole de MSF, Maria Hernandez. Aux côtés de Hernandez se trouvaient Yohannes Halefom Reda et Tedros Gebremariam, tous deux éthiopiens et membres de l'organisation. MSF a assuré qu'elle ne s'arrêtera pas "tant que ce qui s'est passé ne sera pas clarifié", rappelant que les travailleurs "aidaient la population dans une région ravagée par un conflit armé".

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L'Éthiopie est un point d'instabilité dans la Corne de l'Afrique qui menace de devenir l'une des plus grandes crises humanitaires au monde. La grande variété des groupes ethniques et leurs affrontements constituent le plus grand défi à relever pour parvenir à la paix dans le pays. En ce moment, les Tigrins sont ceux qui souffrent le plus de cette guerre qui a causé la mort et le déplacement forcé de milliers de personnes. Parmi ces réfugiés se trouvent 720 000 enfants, selon les chiffres de l'UNICEF. L'agence des Nations unies souligne également les problèmes auxquels ils sont confrontés, tels que les abus, l'exploitation et les maladies. Dans le cas des filles, elles sont soumises à des violences sexuelles.

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A l'exode des réfugiés et au massacre des civils s'ajoutent d'autres massacres tels que les viols généralisés, les pillages et les blocages de l'aide humanitaire par les forces nationales. Mark Lowcock, le coordinateur des secours d'urgence des Nations unies, a déclaré à Reuters que les troupes gouvernementales "affamaient" les citoyens de Trigiri. Le gouvernement éthiopien a également interdit l'accès aux médias, créant un black-out médiatique sur les crimes qu'il commet contre la population de Trigay. Pour toutes ces raisons, de nombreux experts soulignent la possibilité d'un nettoyage ethnique dans la région éthiopienne. Le Haut-Commissariat des Nations unies aux droits de l'homme a averti en mars dernier que les actes commis au Tigré constituaient des "crimes de guerre et des crimes contre l'humanité"