La Russie revendique la plus grande découverte de pétrole en Irak depuis 20 ans

Conformément à la stratégie chinoise de soutien économique aux États disposant de ressources énergétiques apparemment illimitées, la Russie s'est alliée au géant asiatique pour fournir à l'Irak des infrastructures en échange de l'acquisition de pétrole brut à très bas prix. Dans le même temps, cette manœuvre de l'axe Moscou-Beijing éloigne considérablement le pouvoir de l'Occident sur les ressources de la région comprenant l'Irak, le Kurdistan, la Syrie et, en fin de compte, l'Iran.
Le champ d'Eridu, situé à quelque 120 kilomètres à l'ouest et à proximité de la principale route d'exportation du pétrole de Bassorah vers les importants champs pétrolifères de Nasiriyah, est la plus grande découverte irakienne de ces 20 dernières années. Le résultat de cette découverte s'inscrit dans le cadre de la recherche, de l'exploration et du développement du champ 10.
En prenant le contrôle du champ pétrolier d'Eridu, la Russie et la Chine espèrent accélérer la fin de l'hégémonie occidentale dans la région et consolider leur position d'acteurs majeurs sur le marché mondial de l'énergie.

Pour atteindre cet objectif, la société russe Lukoil est prête à prendre le contrôle total de la région pétrolière. Cette décision intervient après que la société japonaise Inpex a décidé de vendre sa participation de 40 % dans le bloc 10, ouvrant ainsi la voie à la domination de Lukoil. En outre, la compagnie pétrolière nationale irakienne, Dhi Qar Oil Company, a officiellement approuvé le développement des réserves du champ 10, y compris le champ pétrolier Eridu.
La Russie envisage également d'acquérir l'immense champ gazier d'Akkaz, situé à la frontière occidentale de l'Irak avec la Syrie. Sa position stratégique permettra au pays de pénétrer "au cœur du croissant chiite", tant du point de vue économique que sécuritaire, en contrôlant les routes terrestres reliant l'Iran, l'Irak et la Syrie, qui deviendront une porte d'entrée pour le pétrole iranien vers l'Europe.

Le contrat Field 10 signé par Lukoil et Inpex en 2012 garantit un taux de compensation relativement élevé de 5,99 dollars par baril. Le pic de production en 2027 devait initialement être d'au moins 250 000 barils par jour (bpj), mais des sources de l'industrie pétrolière russe estiment que ce chiffre pourrait être bien plus élevé, dépassant les 350 000 barils par jour (bpj).
Ce mouvement stratégique de la Russie et de la Chine n'a pas seulement un impact sur l'industrie pétrolière irakienne, mais démontre également leurs ambitions plus larges dans la région. Les efforts de la Russie pour se distancer des États-Unis sont évidents dans son contrôle du pétrole et du gaz kurdes dans la région semi-autonome de l'Irak.

Le succès de cette stratégie dans la région du Kurdistan a donné à la Russie la confiance nécessaire pour continuer à s'opposer à l'intervention américaine au Moyen-Orient. La prise de contrôle de la plus grande découverte de pétrole en Irak depuis deux décennies marque un changement important dans la dynamique des marchés mondiaux de l'énergie. Au Moyen-Orient, l'influence de l'Occident s'affaiblit tandis qu'une nouvelle alliance menée par la Russie et la Chine prend forme.
Lors d'une conférence ministérielle irakienne, il a été convenu que l'Irak soutiendrait pleinement la mise en œuvre de tous les aspects de l'"accord-cadre Irak-Chine" d'ici décembre 2021. Le champ d'application de cet accord est similaire à celui de l'"accord de coopération global", signé en 2019. Un élément clé des deux accords est d'accorder à la Chine le droit de premier refus sur tous les projets pétroliers, gaziers et pétrochimiques proposés en Irak pour la durée de l'accord et au moins 30 % des droits de concession pour toutes les sources d'énergie.

En contrepartie, Pékin sera chargé du développement et de la construction d'usines et d'infrastructures d'appui dans tout le pays. Il s'agit notamment de chemins de fer et d'autres liaisons logistiques et de transport exploités par le personnel des entreprises chinoises basées en Irak, qui sont essentiels au développement de la Route de la soie et de la Ceinture et de la Route.
L'objectif de la Russie et de la Chine de tenir l'Occident à l'écart des transactions énergétiques de l'Irak est de rapprocher Bagdad des nouveaux intérêts irano-saoudiens. C'est pourquoi la Chine soutiendra le développement de l'achèvement de l'infrastructure ferroviaire irakienne et l'électrification du réseau ferroviaire de 900 kilomètres reliant Téhéran à la ville irakienne de Mashhad.

Il est également prévu de construire une ligne à grande vitesse entre Téhéran, Qom et Ispahan et de prolonger cette ligne vers le nord-ouest en passant par Tabriz, afin de relier de nombreux complexes pétroliers, gaziers et pétrochimiques importants. Le point de départ de l'oléoduc Tabriz-Ankara constitue le nouveau point de départ de la Nouvelle route de la soie, longue de 2 300 kilomètres, qui relie Uruban à la ville irakienne de Mashhad. L'oléoduc Tabriz-Ankara, long de 2 300 kilomètres, relie Urumqi (la capitale du Xinjiang) à Téhéran et atteint l'Europe via le Kazakhstan, le Kirghizstan, l'Ouzbékistan, le Turkménistan et la Turquie.