Sans la Russie et la Chine, la paix en Ukraine ne sera pas possible

El presidente ruso Vladimir Putin y al presidente chino Xi Jinping dándose la mano durante una reunión en Pekín el 18 de octubre de 2023 -AFP/SERGEI GUNEYEV
Le président russe Vladimir Poutine et le président chinois Xi Jinping se serrent la main lors d'une rencontre à Pékin le 18 octobre 2023 -AFP/SERGEI GUNEYEV
Les espoirs sont grands pour la conférence de paix sur l'Ukraine qui se tient ce week-end en Suisse, dans le complexe hôtelier du Bürgenstock, au bord du lac des Quatre-Cantons, un lieu idyllique qui a déjà accueilli les pourparlers de paix sur le Soudan et Chypre. Un lieu idyllique en termes de paysage, qui a déjà accueilli des pourparlers de paix sur le Soudan et Chypre.  

Une centaine de dirigeants du monde entier, dont de nombreux Européens, seront présents, ainsi que la vice-présidente américaine Kamala Harris, qui remplace le président Joe Biden, occupé dans le sud de l'Italie à une autre réunion cruciale, le G7. Tant en Italie qu'en Suisse, Volodimir Zelenski, le président ukrainien, sera présent. Il estime que les premières bases d'un programme de paix peuvent être jetées pour mettre fin à la longue guerre déclenchée par l'invasion russe décrétée par Vladimir Poutine.  

Cependant, parmi les nombreux noms illustres qui vont se rencontrer dans les vertes montagnes suisses, ni les Russes ni les Chinois ne sont présents, c'est-à-dire deux acteurs aussi importants qu'incontournables pour trouver une solution plus ou moins définitive au premier grand conflit subi par l'Europe depuis la Seconde Guerre mondiale, le deuxième si l'on compte la guerre qui a désintégré la Yougoslavie et pour la solution de laquelle les États-Unis ont été appelés une fois de plus à agir et à réaliser ce que l'Europe n'a pas été capable de faire.  

Alors que ni les Russes ni les Chinois ne sont à la table des négociations en Suisse, l'Ukraine aspire à faire signer un plan commun par la centaine de chefs d'Etat et de gouvernement de pratiquement tous les continents, persuadée qu'un tel soutien serait difficilement refusable par Moscou et Pékin. C'est du moins la conviction d'Andriy Yermak, le chef de l'administration présidentielle de Kiev, élément clé de cette conférence de paix.  

Si un document plus ou moins unanimement accepté émerge en Suisse, l'Ukraine espère que la Russie se joindra à une seconde conférence, où les aspects pratiques de la feuille de route pour la paix seront censés être discutés.  

Pour l'instant, c'est loin d'être le cas. Pour commencer, et presque simultanément, le G-7 en Italie pourrait se mettre d'accord définitivement sur l'utilisation des avoirs russes à l'étranger pour financer la reconstruction de l'Ukraine, une opération dont les coûts vont de 600 milliards à mille milliards d'euros, sans compter les immenses dommages personnels et moraux infligés au courageux peuple ukrainien. Une telle disposition a déjà été disqualifiée préventivement par Moscou, ce qui pourrait accroître sa colère si de nouvelles sanctions lui étaient imposées, lesquelles ont été jusqu'à présent largement atténuées grâce à l'aide de la Chine, dont les faveurs ont apporté à Pékin l'énorme avantage de satisfaire ses besoins en pétrole à la moitié du prix du marché, compte tenu de l'impérieuse nécessité pour la Russie de fournir un débouché à son principal poste d'exportation.  

Andriy Yermak, déjà cité, estime que les précédentes tentatives de médiation, par le biais de formats bilatéraux avec les principaux dirigeants européens et américains essayant de faire pression sur Poutine, n'ont pas fonctionné, de sorte que cette nouvelle tentative multilatérale et presque universelle vaut au moins la peine d'être tentée.  

Ce qui est certain, c'est que si la Russie a modifié ses objectifs en Ukraine, elle ne semble pas vouloir renoncer au plus important, à savoir la consolidation de sa domination et de sa permanence dans les territoires conquis de l'est et du sud de l'Ukraine, et on pourrait même ajouter qu'elle ne renonce pas à l'objectif de s'emparer de l'importante ville portuaire d'Odessa, une fois qu'il aura été établi que les drones britanniques lancés à partir de cette ville peuvent faire des ravages sur la flotte russe de la mer Noire.   

D'autres mouvements diplomatiques simultanés non moins importants méritent également d'être soulignés. Par exemple, la visite du secrétaire général de l'OTAN, Jens Stoltenberg, en Hongrie, dont le dirigeant Viktor Orban se montre de plus en plus critique à l'égard de l'augmentation de l'aide militaire de l'Alliance à l'Ukraine. Compte tenu de l'entêtement d'Orban, il n'est pas exclu de lui offrir une sorte de « droit de retrait » de l'organisation ou du moins de ses grandes décisions, notamment celle sur l'aide à long terme à l'Ukraine.  

La Hongrie, cette épine dans le pied de l'UE et de l'OTAN, s'oppose également à ce que le Premier ministre néerlandais sortant, Mark Rutte, devienne le prochain secrétaire général de l'OTAN, ce qui a déjà été pratiquement accepté par tous. Budapest propose à la place le président roumain Klaus Iohannis, sur lequel les États-Unis font pression pour qu'il se retire.  

L'ordre du jour des questions qui seront débattues en Suisse est néanmoins de la plus haute importance, non seulement pour l'Ukraine, mais aussi pour ses voisins de l'UE et au-delà : sécurité nucléaire, sécurité alimentaire, libération des prisonniers de guerre et retour des enfants ukrainiens enlevés par la Russie.