Le modèle de souveraineté stratégique du Maroc

Alors que le roi Mohammed VI célèbre ses 26 ans de règne au Maroc, une réalité s'impose : son règne a discrètement mais résolument redéfini les contours géopolitiques de l'Afrique du Nord et du Sahel. Alors qu'une grande partie du Moyen-Orient et de l'Afrique du Nord a été façonnée par l'instabilité et les interventions extérieures, le Maroc a tracé sa propre voie, ancrée dans la stabilité, les réformes progressives et une diplomatie d'envergure stratégique.
Ce qui rend particulièrement remarquable la trajectoire du Maroc sous Mohammed VI, ce n'est pas seulement la rapidité de la transformation, mais aussi la méthode : la souveraineté d'abord, les institutions avant les personnalités, et une influence continentale fondée sur l'interdépendance et non sur l'hégémonie.
La doctrine de la souveraineté
Dès le début, le roi Mohammed VI a gouverné avec un engagement profond en faveur de la souveraineté territoriale, économique et stratégique. Cela n'est nulle part plus évident que dans sa gestion du dossier du Sahara occidental.
Sous sa direction, le Maroc a réalisé une percée diplomatique historique : la reconnaissance de sa souveraineté sur le Sahara par une coalition toujours plus large de puissances mondiales. Aujourd'hui, trois membres permanents du Conseil de sécurité des Nations unies – les États-Unis, la France et le Royaume-Uni – soutiennent le plan d'autonomie du Maroc comme seule solution réaliste et durable. Plus de 22 pays européens, dont l'Espagne, l'Allemagne, les Pays-Bas et la Roumanie, ont approuvé cette approche, tandis que des dizaines d'États arabes, africains, asiatiques et latino-américains ont soit déclaré leur soutien officiel, soit ouvert des consulats à Laâyoune et Dakhla.
Ce n'est pas le résultat d'une puissance militaire ou d'alliances idéologiques. C'est le fruit d'une diplomatie stratégique soutenue, guidée par les plus hautes instances et fondée sur les réalités du terrain. Le Maroc a redéfini la question du Sahara, qui n'est plus un conflit hérité du passé, mais une solution axée sur le développement, ancrée dans l'autonomie et l'intégration.
Un ordre régional construit de l'intérieur
Alors que le monde observe la concurrence mondiale se jouer en Afrique, le Maroc a discrètement élaboré un modèle alternatif d'engagement africain : un modèle qui ne repose pas sur des bases étrangères, des politiques par procuration ou la dépendance.
En 2023, le roi Mohammed VI a lancé l'Initiative atlantique, une proposition transformatrice visant à relier les pays enclavés du Sahel à l'Atlantique grâce aux ports, aux corridors et aux infrastructures marocains. Cette initiative est de nature géopolitique, offrant à ces États un accès aux routes commerciales mondiales, aux flux énergétiques et à la logistique qui contournent les zones instables.
Elle s'appuie sur des efforts antérieurs, tels que le gazoduc Nigeria-Maroc, qui traversera plus d'une douzaine de pays africains et apportera sécurité énergétique, investissements industriels et prospérité partagée. Cette vision panafricaine des infrastructures remet directement en cause les modèles de développement extractif et réaffirme l'action des États africains, pour le bénéfice de l'Afrique.
Une résilience économique avec un moteur social
Sur le plan intérieur, le Maroc a mené l'un des programmes de modernisation les plus complets du monde en développement. Le pays abrite désormais le plus grand port d'Afrique, un réseau ferroviaire à grande vitesse et un secteur des énergies vertes en pleine expansion. Il ne s'agit pas de mégaprojets isolés, mais de maillons d'une stratégie plus large visant à assurer la souveraineté économique et la compétitivité régionale.
Mais ce qui distingue le programme national de Mohammed VI, c'est sa logique sociale. Au cours des cinq dernières années, le Maroc a lancé une refonte structurelle de son État-providence : couverture sanitaire universelle, retraites pour les travailleurs informels et allocations familiales pour les plus vulnérables. Dans une région où l'austérité précède souvent les réformes, le Maroc développe l'État social de manière ciblée et dans le respect de la discipline budgétaire.
Cet équilibre entre capital et compassion, entre croissance et cohésion, reflète la conviction du roi que la stabilité doit se mériter et ne peut être imposée.
Jérusalem, la Palestine et l'équilibre diplomatique
En tant que président du Comité Al Quds, le roi Mohammed VI a également maintenu une position de principe sur la cause palestinienne, fondée sur la légitimité et l'engagement actif. Le Maroc a fourni une aide humanitaire à Gaza, défendu la solution à deux États et soutenu la préservation culturelle et religieuse à Jérusalem par l'intermédiaire de l'Agence Bayt Mal Al Quds.
Dans le même temps, le Maroc a poursuivi la normalisation avec Israël dans le cadre des accords d'Abraham, démontrant ainsi une capacité d'équilibre diplomatique que peu d'acteurs régionaux ont atteinte. Il s'agit d'une politique étrangère fondée sur la souveraineté et non sur l'alignement, qui prouve que l'intérêt national fondé sur des principes ne doit pas nécessairement être sacrifié au profit de l'engagement régional.
Un modèle pour les puissances moyennes stratégiques
À l'heure où les puissances moyennes cherchent des moyens de naviguer dans un environnement multipolaire instable, le Maroc de Mohammed VI offre un modèle cohérent et reproductible :
- Une diplomatie affirmée fondée sur l'intégrité territoriale
- Un leadership continental basé sur le codéveloppement
- La sécurité grâce à l'interdépendance en matière d'infrastructures et d'énergie
- Des relations internationales équilibrées qui respectent les lignes rouges nationales
Il ne s'agit pas de « soft power », mais d'une politique souveraine au sens réaliste le plus pur : construire le pouvoir par l'autonomie, les partenariats par les valeurs et la légitimité par les résultats.
Conclusion
En 26 ans, le roi Mohammed VI a non seulement transformé les institutions et l'économie du Maroc, mais il a également redéfini sa place dans le monde. Ce faisant, il a discrètement remis en question les notions dépassées de dépendance africaine, d'instabilité arabe et d'irrelevance des puissances moyennes.
Le Maroc est aujourd'hui une plaque tournante continentale, un acteur diplomatique et un partenaire de confiance en Afrique, en Europe et au Moyen-Orient. Pour ceux qui, à Washington et ailleurs, recherchent des partenaires fiables et soucieux de leur souveraineté dans les pays du Sud, le Maroc mérite plus que la reconnaissance. Il mérite notre attention et un alignement stratégique sérieux.