Africa Watch réitère sa dénonciation des violations des droits dans les camps de Tindouf

L'Organisation africaine pour la surveillance des droits de l'homme (Africa Watch) a écrit à Staffan de Mistura, envoyé spécial du Secrétaire général de l'ONU pour le Sahara occidental, pour souligner sa "détermination à réactiver la voie de la négociation et de la politique pour trouver une solution au conflit du Sahara occidental qui mettrait fin à la tragédie des Sahraouis".
La coalition d'ONG sahraouies s'est donc formellement présentée à Staffan de Mistura afin de consolider et de poursuivre l'établissement de multiples niveaux de coopération et de compréhension entre les entités et de faciliter la défense des droits de l'homme dans la région du Sahara Occidental et les camps de réfugiés sahraouis à Tindouf.
Africa Watch a envoyé cette lettre à l'Envoyé Spécial du Secrétaire général des Nations unies à l'occasion de sa visite au Sahara occidental et de la préparation du rapport annuel du Secrétaire général des Nations unies sur la situation au Sahara occidental, pour exprimer son point de vue sur le conflit et s'engager dans la relance des négociations pour aider à trouver une solution en matière de droits de l'homme, ainsi que sur les questions liées à la complexité du conflit, qui affectent la réalisation de tout développement positif dans l'avenir.
Africa Watch réitère à cet égard sa dénonciation des violations présumées des droits de l'homme à l'encontre des Sahraouis dans les camps de réfugiés de Tindouf, installations dont le Front Polisario et l'Algérie sont responsables, puisqu'elles se trouvent sur le territoire algérien.

La lettre envoyée par Africa Watch à Staffan de Mistura est reproduite ci-dessous.
Son Excellence M. Staffan de Mistura
Envoyé personnel du Secrétaire général des Nations unies pour le Sahara occidental
Au nom d'Africa Watch, du Réseau international pour les droits de l'homme et le développement et des défenseurs des droits de l'homme, nous apprécions grandement votre détermination, Monsieur l'Envoyé personnel du Secrétaire général, à relancer la voie de la négociation et de la politique pour trouver une solution au conflit du Sahara occidental qui mettrait fin à la tragédie des Sahraouis, qui n'a pas été résolue depuis cinq décennies maintenant, sans espoir de mettre fin à l'état de fragmentation qui a déchiré les Sahraouis.
L'absence de progrès dans la recherche d'une solution politique juste et durable au conflit du Sahara occidental a laissé le champ libre à la reproduction des causes qui alimentent le conflit, à la propagation du discours de haine et à la haine entre les Sahraouis, et à l'augmentation de la tension dans toute la région, ce qui laisse présager une prolongation indéfinie du conflit, l'aggravation de la situation de la population du Sahara occidental, en la démembrant et en empêchant le regroupement des familles de part et d'autre du mur de sécurité, et l'apparition fréquente de graves violations des droits de l'homme dans les camps de Tindouf, en raison de la pression populaire et des actions de protestation continues menées par les résidents des camps, en raison des nombreuses manifestations de violence dans la région de Tindouf et à l'intérieur des camps et des attaques menées par le personnel de sécurité du Front Polisario et certains chefs de l'armée algérienne contre les opposants aux politiques du Front Polisario, ainsi que contre les activités de la société civile sahraouie, y compris les défenseurs des droits de l'homme, des militants et des mouvements de jeunesse ont fait l'objet de répression et de tentatives de les faire taire, en raison de leurs demandes de lutte contre la corruption au sein des camps et d'exiger des éclaircissements sur la position du Front Polisario concernant la mise en œuvre des résolutions du Conseil de sécurité stipulant la nécessité de rechercher une solution politique compatible à la question du Sahara occidental.
La coalition d'organisations non gouvernementales signataires de cette lettre a enregistré de nombreuses et graves violations au cours des cinq dernières années dans les camps sahraouis de Tindouf, allant des exécutions extrajudiciaires aux disparitions forcées et à la torture prolongée, dont la dernière en date s'est produite un mois avant l'annonce de sa visite dans la ville de Laayoune, suite aux agissements des membres des forces de sécurité du Polisario dans l'enlèvement de l'activiste civil Mohamed Salem Ould Maa El Ainine Ould Assouid, suite à sa dénonciation du vol et de la contrebande de l'aide humanitaire destinée aux résidents du camp.
La prépondérance des convictions sur l'issue du conflit du Sahara Occidental exige de toutes les parties impliquées dans le conflit de créer un climat de confiance et de paix qui soutient la liberté d'expression, la liberté d'opinion, la liberté de réunion, et l'examen de multiples options qui permettent la poursuite de moyens de subsistance dignes sur la terre du Sahara Occidental, sans s'embourber dans le labyrinthe des positions rigides de certaines parties au conflit qui appellent à la nécessité d'organiser un référendum sur l'autodétermination, et l'expérience sur le terrain de la MINURSO et des représentants spéciaux précédents a montré l'impossibilité d'en tenir un, en raison de la réticence de l'État hôte à permettre l'enregistrement et le recensement des Sahraouis présents sur son territoire pour déterminer qui est descendant du territoire du Sahara occidental et qui ne l'est pas, et par conséquent d'accorder un statut juridique aux réfugiés. L'approbation du statut des personnes déplacées de la région et la limitation de la liste des personnes ayant le droit de voter au référendum.

Le rejet systématique des Sahraouis vivant dans la région lors des opérations d'identification, l'exclusion de groupes tribaux entiers, faute d'une large représentation dans les camps, et l'inclusion d'autres groupes vivant dans le sud de l'Algérie, le nord de la Mauritanie et diverses régions du Mali, dans le but d'étouffer les réglementations à élaborer, et le lancement de campagnes médiatiques biaisées visant à influencer les convictions et les positions des différents groupes de Sahraouis au Sahara Occidental, dans les camps et dans la diaspora qui sont impliqués dans le conflit, ce qui a rendu la possibilité d'organiser un référendum plus proche de l'impossibilité que de la réalité.
Par conséquent, la coalition d'organisations non gouvernementales a décidé de poursuivre une solution politique juste qui assurera la dignité des Sahraouis sur leur terre, mettra fin à leurs souffrances continues et leur garantira la jouissance de tous les droits et libertés stipulés dans les principales conventions internationales sur les droits de l'homme.
La coalition d'organisations non gouvernementales, tout en se félicitant de l'annonce de sa visite dans la ville de Laayoune au Sahara occidental, reconfirme son engagement à poursuivre ses efforts en vue de la reprise des négociations entre toutes les parties impliquées dans le conflit, sans conditions préalables, et sa volonté d'engager un dialogue franc, de bonne foi et avec un haut degré de réalisme pour parvenir à une solution qui garantisse la justice pour les Sahraouis, en réunifiant leur unité sur leur terre, et en travaillant pour construire la confiance perdue entre eux en raison des tensions de l'une des parties au conflit pour perpétuer la crise.
Nous, défenseurs sahraouis des droits de l'homme, nous déclarons prêts à vous rencontrer, Monsieur l'Envoyé personnel, et à échanger nos points de vue sur le conflit et les questions qui y sont liées, afin de faire entendre la voix d'une société civile indépendante, disciplinée par les normes et les lignes directrices internationales pour le travail dans le domaine des droits de l'homme. Nous considérons le succès de son mandat comme l'un de nos objectifs et de nos préoccupations dans la région du Sahara Occidental et dans les camps sahraouis.

Nous, au sein de la coalition des organisations non gouvernementales sahraouies, considérons vos efforts inlassables pour relancer le cours des négociations entre les parties, afin de parvenir à une solution politique définitive au conflit, comme une dernière chance de mettre fin à un conflit de longue durée, dont les effets et les vestiges ont fait souffrir des générations successives.
Alors que les Sahraouis de la région du Sahara occidental jouissent de tous les droits et libertés stipulés dans la législation nationale marocaine et les instruments internationaux régissant les droits de l'homme, y compris la participation politique et la représentation démocratique de la population, ainsi que le contrôle de la gestion générale de leurs affaires locales, les habitants des camps de Tindouf et de la ville de Tindouf sont les seuls à bénéficier de ces droits et libertés, les résidents des camps de Tindouf restent totalement coupés de toute protection internationale conformément à la Convention internationale sur les réfugiés et à son protocole, et dans la plupart des législations nationales européennes, ils sont classés comme apatrides, ne disposant pas de documents d'identification du pays d'accueil des camps ou de cartes de réfugiés pour déterminer leur statut juridique.
Sur la base de notre croyance dans les principes d'égalité et de justice et de la Charte des Nations Unies qui stipule que les solutions aux conflits doivent être mises en œuvre par des moyens pacifiques qui garantissent les intérêts et les droits des personnes affectées par ces conflits, et sur la nécessité de prendre des mesures appropriées pour renforcer la paix dans la région, nous soutenons vos efforts, Monsieur envoyé personnel du Secrétaire général des Nations unies, pour examiner la question de la reprise d'un dialogue sérieux et sincère, afin de résoudre le conflit du Sahara occidental, d'une manière qui garantisse la guérison des blessures des Sahraouis et mette fin à leur longue souffrance avec l'état de fragmentation qui les afflige depuis 1975, et la nécessité de faire preuve de réalisme politique et de respecter l'opinion de la majorité des Sahraouis sur la nécessité d'assurer leur stabilité sur leur terre et d'œuvrer pour trouver des moyens de pourvoir à leur bien-être, selon un modèle de gestion qui vise à gérer leurs affaires sur leur propre terre, plutôt que de les confiner dans une zone qui ne remplit pas les conditions minimales pour une vie digne - et en dehors de tout cadre de protection internationale - et en étant totalement privés de la possibilité de puiser dans les ressources nationales du pays qui accueille les camps, et la série continue de pillages et de contrebande de l'aide humanitaire internationale vers les camps, en dépit de son montant limité.
Notre travail dans le domaine de la protection et de la promotion des droits de l'homme dans la région a renforcé notre conviction de la nécessité de soulever les questions et les cas de violations graves dans les camps de Tindouf, qu'il s'agisse de groupes de Sahraouis vivant dans les camps, de prisonniers de guerre, de prisonniers politiques, d'activistes et de défenseurs des droits de l'homme, qui continuent à se plaindre de l'absence de clarification de leurs mérites, auprès des mécanismes internationaux de protection des droits de l'homme, que ce soit des organes de traités ou des mécanismes extra-conventionnels, n'ont pas été en mesure de construire des ponts de coopération avec les autorités algériennes en tant que pays hôte des camps, parce que les sentiments de colère croissants parmi les Sahraouis ont continué à se renforcer pour ne pas avoir cherché à obtenir réparation et à s'excuser pour les préjudices qu'ils ont subis du fait des violations commises par un acteur non étatique qui a continué à abuser d'eux en dehors de toute protection internationale significative et avec l'autorisation directe du gouvernement du pays hôte.

La coalition d'ONG place beaucoup d'espoir dans les efforts de l'envoyé personnel du Secrétaire général, M. Staffan de Mistura, pour relancer la roue des négociations afin de mettre fin au conflit et d'ouvrir la voie à des solutions politiques qui répondent aux souhaits et aux aspirations des Sahraouis à la stabilité, au développement et à la vie sur leur terre, selon une combinaison de mesures qui respectent leur vie privée, leur culture et leur mode de vie, dans le respect de la cohésion et de l'harmonie des autres composantes de la mosaïque maghrébine, dont la sécurité et les opportunités de développement sont affectées depuis des décennies par la persistance de conflits à caractère géopolitique dans le cadre de la lutte pour le leadership régional entre les puissances de la région.
Tout en réaffirmant la disponibilité des membres de la coalition des organisations non gouvernementales à contribuer sérieusement à surmonter les obstacles à l'ouverture d'un dialogue sérieux et réaliste avec les composantes de la société civile sahraouie, en relation avec la recherche d'une solution juste et réaliste au conflit, nous renouvelons notre ouverture aux efforts de l'Envoyé personnel dans la recherche d'une solution définitive au conflit et accueillons favorablement tout appel au dialogue et à l'expression de nos points de vue et positions sur l'ensemble de la question.
En conclusion, je vous prie d'agréer, Monsieur l'Envoyé personnel du Secrétaire général des Nations unies, Staffan de Mistura, l'expression de mon respect et de mon appréciation les plus sincères.
Signé :
Abdelouahab Gain Brahim Lahcen Oublal Dr. Amina Laghazal
Africa Watch International Network for Human Defenders for
Rights and Development Human Rights