L'Iran évite de pointer du doigt le rôle de la Turquie et du Qatar en Syrie

Alors qu'il tente de rompre son isolement régional, Téhéran évite d'accuser Doha et Ankara de promouvoir le front de l'opposition en Syrie 
Líder Supremo de Irán, el ayatolá Ali Jamenei, observa durante una reunión en la exhibición de logros de la Fuerza Aeroespacial del IRGC en Teherán, Irán, el 19 de noviembre de 2023 - Oficina del Líder Supremo iraní WANA (Agencia de Noticias de Asia Occidental) vía REUTERS
Le guide suprême iranien, l'ayatollah Ali Khamenei - Bureau du guide suprême iranien WANA (West Asia News Agency) via REUTERS

Quelques jours après l'attaque lancée par les rebelles islamistes en Syrie, dont certains sont soutenus par la Turquie, le régime de Bachar el-Assad tente de reconquérir les territoires perdus avec l'aide de ses alliés, notamment la Russie. 

La République islamique d'Iran, un autre des principaux soutiens de Damas, a réitéré son soutien au régime d'Al-Assad lors du voyage de son ministre des Affaires étrangères en Syrie, quelques jours après la prise d'Alep par les rebelles menés par le groupe islamiste Hayat Tahrir al-Sham (HTS), lié par le passé à Al-Qaïda. 

Par la diplomatie, l'Iran tente également d'obtenir le soutien du Qatar et de la Turquie, qui soutiennent les milices anti-Assad. 

Au cours de la guerre civile syrienne, Doha a principalement soutenu les groupes anti-régime en leur apportant un soutien financier, diplomatique et, dans certains cas, militaire. Toutefois, le soutien du Qatar aux groupes d'opposition a suscité la controverse, certaines milices ayant des liens avec des factions plus radicales et islamistes, ce qui a entraîné des tensions avec l'Occident. 

Doha a également travaillé en étroite collaboration avec la Turquie pour promouvoir l'éviction d'Assad. Comme le Qatar, Ankara s'est attaché à soutenir l'Armée syrienne libre (ASL) anti-Damas afin de renverser le gouvernement syrien, de limiter l'influence iranienne et de limiter l'influence des Kurdes dans la région. 

Bien que conscient des intérêts de la Turquie et du Qatar, Téhéran évite d'accuser directement ces deux pays de soutenir l'opposition syrienne et rejette plutôt la responsabilité des derniers développements en Syrie sur Israël.  

<p>El presidente turco, Tayyip Erdogan - REUTERS/ MURAD SEZER</p>
Le président turc Tayyip Erdogan - REUTERS/ MURAD SEZER

Jérusalem, pour sa part, a exprimé son inquiétude quant au fait que les rebelles syriens pourraient avoir accès à des missiles, à des installations de production et de stockage d'armes chimiques telles que le gaz sarin, à des chars, à des véhicules blindés de transport de troupes et à des avions dans des bases situées dans et autour de la région d'Alep.  

Outre les arsenaux, cette zone - anciennement contrôlée par le régime - contient des infrastructures pour la production d'armes telles que des missiles à guidage de précision, dont certains sont produits pour le Hezbollah et les milices chiites pro-iraniennes. 

Téhéran, qui cherche à rompre son isolement régional, évite d'accuser directement le Qatar et la Turquie d'être à l'origine du front d'opposition en Syrie. Le régime iranien a établi des alliances stratégiques avec des pays tels que le Qatar afin de renforcer les liens diplomatiques et sécuritaires. En outre, le régime iranien bénéficie du soutien des médias qataris, en particulier d'Al Jazeera, qui joue un rôle clé dans la diffusion du discours de Téhéran et dans la promotion de l'agenda de ce que l'on appelle « l'axe de la résistance » dans la région. 

El emir de Qatar, el jeque Tamim bin Hamad al-Thani - PHOTO/REUTERS
L'émir du Qatar, le cheikh Tamim bin Hamad al-Thani - PHOTO/REUTERS

C'est pour cette raison que, lors de sa conversation téléphonique avec l'émir du Qatar, le cheikh Tamim bin Hamad Al Thani, le président iranien a évité de porter des accusations directes ou de blâmer Doha. Au contraire, comme le rapporte l'Agence de presse iranienne (IRNA), il s'est contenté de noter que « la propagation du chaos et du terrorisme dans la région ne profite à aucun pays », ajoutant que « tous les pays de la région devraient jouer un rôle constructif pour faire face à ce phénomène maléfique ». 

Quant à la Turquie, sa relation avec l'Iran dans le contexte de la guerre syrienne a été basée sur un équilibre entre compétition et coopération. Bien qu'elles soutiennent des acteurs différents dans le conflit, les relations bilatérales entre les deux pays sont restées inchangées pendant les années de guerre.  

Combatientes rebeldes en la provincia de Idlib, Siria - PHOTO/Reuters/Mahmoud Hassanoarabicphoto
Combattants rebelles dans la province d'Idlib, en Syrie - PHOTO/Reuters/Mahmoud Hassanoarabicphoto

En effet, lors de sa visite à Ankara, le ministre iranien des Affaires étrangères Abbas Araqchi n'a pas demandé à la Turquie d'arrêter l'attaque ou de retirer son soutien aux groupes armés, mais a exhorté à des consultations et à un dialogue étroit pour assurer la stabilité en Syrie afin de préserver les acquis du processus d'Astana. 

Le Qatar et la Turquie profitent du fait que la marge de manœuvre de l'Iran sur le terrain est devenue très limitée. Plusieurs raisons à cela : l'impossibilité de mobiliser les milices irakiennes en Syrie en raison des restrictions imposées par Bagdad, l'incapacité du Hezbollah à mener une nouvelle guerre après le démantèlement d'une grande partie de son leadership et les effets des combats sur sa confrontation avec Israël.