Première rencontre entre les États-Unis et les talibans après le retrait des troupes d'Afghanistan

La prise de Kaboul par les talibans, il y a un peu moins de deux mois, a marqué le début d'une nouvelle phase - inquiétante - en Afghanistan. Le retrait des troupes américaines du pays après 20 ans de présence sur le sol afghan a été mis à profit par les radicaux pour prendre le pouvoir et diriger le pays. Aujourd'hui, en position de leadership, ils s'assoient pour discuter avec les États-Unis tout en recevant le soutien de la Chine, qui cherche à assurer sa présence en Afghanistan à tout prix. L'ambitieux projet Belt and Road conçu par Pékin implique de garantir le tracé de la route dans la région aujourd'hui contrôlée par les talibans, ce qui ne rassure pas totalement les hommes de Xi Jinping.

La situation en Afghanistan oblige les grandes puissances à s'asseoir et à discuter afin de rapprocher les positions et, au moins, d'essayer de contribuer à améliorer la réalité actuelle à laquelle est soumise la population afghane, dont les droits - notamment ceux des femmes - ont été drastiquement réduits. Washington a tenu sa première réunion à Doha avec les talibans, qui ont demandé à l'administration Biden de lever le blocus sur les réserves de la Banque centrale afghane déposées à la Réserve fédérale. Le ministre taliban des Affaires étrangères par intérim, Amir Khan Muttaqi, a déclaré à Al Jazeera.
Toutefois, le refus des talibans de faire face à la menace d'ISIS n'est pas propice à la levée du blocus américain. Après le chaos de la prise de la capitale afghane, les Talibans cherchent à légitimer leur gouvernement au niveau international, ce qui ne sera pas facile pour eux. De plus, malgré la rencontre entre les extrémistes et les Américains, Washington affirme n'avoir aucune intention de reconnaître ou de légitimer le contrôle des talibans, mais que la rencontre s'est limitée à des questions d'intérêt national pour les Américains.

L'un des aspects que les représentants de l'administration Biden ont voulu aborder est le départ des personnes qui se trouvent encore sur le territoire afghan et qui veulent quitter le pays. En outre, ils exhortent les talibans à respecter les droits des citoyens, en particulier ceux des femmes et des filles. L'administration américaine se plaint de la lenteur du processus d'identification des ressortissants afghans américains et basés aux États-Unis en vue de leur retour dans le pays. C'est là que le Qatar, qui accueille actuellement la réunion entre les deux parties, joue un rôle important pour tenter d'accélérer le processus.
Jusqu'à 1 300 personnes ont été évacuées grâce à l'aide fournie par Doha. Le dernier des six avions affrétés par le Qatar a transporté mercredi des ressortissants étrangers et même des Afghans qui pourraient être en danger dans leur pays sous le régime des Talibans. Ce processus d'évacuation, qui n'est pas encore achevé, est une autre raison de la rencontre entre les talibans et les États-Unis. L'intention n'est pas d'arrêter les discussions ici, mais de rester en contact au moins jusqu'à dimanche, date à laquelle plusieurs représentants de pays européens sont attendus dans la capitale qatarie.

Cependant, l'Europe n'est pas aussi claire que les Talibans : "De bonnes relations avec l'Afghanistan sont bonnes pour tout le monde. Rien ne doit être fait pour affaiblir le gouvernement actuel de l'Afghanistan, qui peut prendre l'initiative de trouver des solutions aux problèmes de son peuple", a déclaré Khan Muttaqi à l'AFP. Le ministre des affaires étrangères des Talibans a même averti les Américains et les Européens que "nous leur avons dit clairement que tenter de déstabiliser le gouvernement afghan n'est bon pour personne".
S'il y a une chose qui est claire en Occident, c'est que la sécurité de la population afghane dépend d'une table de négociation avec les talibans. La relation avec ISIS est la plus grande préoccupation du moment, car l'ouverture de pourparlers officiels avec le nouveau gouvernement taliban légitimerait le contrôle pris par la force d'un groupe extrémiste qui n'hésite pas à violer systématiquement les droits de l'homme. D'autre part, la très grave crise humanitaire que traverse l'Afghanistan oblige les principales puissances occidentales à décider du sort d'un pays dont 75% des dépenses publiques étaient assurées par l'aide reçue de l'étranger et qui, avec l'arrivée des Talibans, s'est effondré.