L'Espagne, face à un sommet de l'OTAN crucial

Les 29 et 30 juin, l'Espagne accueillera à Madrid un sommet de l'OTAN que le secrétaire général, Jens Stoltenberg, a qualifié d'historique. Nous, les Alliés, avons réagi rapidement, fermement et unanimement à l'agression de la Russie contre l'Ukraine, mais nous devons maintenant aussi renforcer les fondements de notre sécurité pour la prochaine décennie. À Madrid, les chefs d'État et de gouvernement des pays alliés adopteront un nouveau Concept stratégique qui régira la vie de l'organisation pendant une décennie, définissant les priorités de l'organisation et identifiant les principales menaces auxquelles elle sera confrontée au cours de la prochaine décennie.
La sécurité sur le flanc oriental sera une question majeure lors du sommet de Madrid. L'attaque russe contre l'Ukraine a entraîné un retour à la guerre conventionnelle sur le continent européen. L'Espagne participe activement à la défense collective de ce flanc oriental et aux efforts visant à ramener la paix en Europe. Mais l'Espagne a également été ferme dans sa position selon laquelle le flanc sud doit être reflété dans le concept stratégique de Madrid et lors du sommet. À cette fin, les ministres des Affaires étrangères organiseront le 29 juin un dîner de travail consacré à ce flanc, et les chefs d'État et de gouvernement aborderont le voisinage méridional lors d'une de leurs sessions.
L'Espagne déploie déjà des efforts importants dans le voisinage méridional, comme en témoigne notre participation à l'EUTM Mali et notre présidence de l'Alliance pour le Sahel à l'appui du G5, mais il est important de renforcer l'engagement de l'OTAN dans une région où un certain nombre de menaces se profilent. C'est une bonne nouvelle que la Mauritanie et la Jordanie participent à l'une des sessions de travail du Sommet.
L'OTAN adopte depuis longtemps une approche à 360 degrés de la sécurité, reconnaissant que les menaces pour notre bien-être peuvent venir de toutes les directions et pas seulement des menaces militaires. Aujourd'hui, nous assistons à une agression conventionnelle à l'Est, mais celle-ci a été précédée et accompagnée d'attaques hybrides de différents types. La coupure ou la réduction des approvisionnements énergétiques et l'instrumentalisation inacceptable des flux migratoires constituent une menace grave pour notre sécurité et notre souveraineté. Demain, ces menaces pourraient également se produire sur le flanc sud, et nous ne pouvons donc pas nous permettre de les négliger ou de les ignorer.
Le sommet de Madrid devrait également servir d'impulsion pour accélérer la coordination entre l'OTAN et l'UE. La collaboration entre les deux organisations est déjà très intense, il ne pourrait en être autrement puisque 21 États, bientôt 23 si tout va bien, sont membres des deux organisations.
S'il subsistait encore des doutes sur la complémentarité entre les deux organisations, la réaction des alliés et de l'Europe à la guerre en Ukraine les a tous dissipés : tandis que l'OTAN a renforcé les troupes déployées pour assurer une dissuasion efficace de toute attaque armée contre tout territoire allié, l'UE a adopté en un temps record plusieurs trains de sanctions extrêmement ambitieux, et a également activé pour la première fois le Fonds européen de soutien à la paix afin de fournir aux autorités ukrainiennes le matériel nécessaire pour défendre leur souveraineté et leur intégrité territoriale.
Il est nécessaire d'avancer sur cette voie ouverte et de renforcer encore les mécanismes de coordination OTAN-UE, car nous sommes convaincus que loin d'affaiblir ou de générer des doublons, la construction d'une Europe de la défense renforce la capacité de l'OTAN à défendre la zone transatlantique. Là aussi, il est important qu'un dîner euro-atlantique se tienne à Madrid pour la première fois dans l'histoire de l'organisation, réunissant les dirigeants de tous les États membres des deux organisations, comme un symbole de l'unité absolue de deux communautés de démocraties qui partagent les mêmes valeurs.
Notre pays a assumé une grande responsabilité en proposant d'accueillir le plus important sommet de l'OTAN depuis des décennies, un sommet crucial, qui s'ajoute à l'engagement quotidien de nos diplomates et de nos forces armées dans les missions de l'OTAN à l'étranger. C'est aussi grâce à leurs efforts que le Sommet sera un succès. Nous nous emploierons à promouvoir l'adoption d'un nouveau concept stratégique qui permettra à l'OTAN de continuer à garantir la sécurité du peuple espagnol, notre souveraineté, notre prospérité et nos valeurs démocratiques dans la zone euro-atlantique.
José Manuel Albares Bueno, ministre espagnol des Affaires étrangères, de l'Union européenne et de la Coopération.