À propos du pacte européen sur les migrations et l'asile

Atalayar_ Pacto de Migración y Asilo UE

Le 23 septembre dernier, la Commission européenne, présidée par Ursula von der Leyen, a publié le Pacte sur l'immigration et l'asile, un document qui définit des lignes d'action et propose des changements législatifs afin de remédier à une question qui soulève des opinions et des points de vue très différents parmi les États membres de l'Union européenne, souvent difficiles à concilier. Le pacte est l'une des six priorités de la nouvelle Commission européenne, qui s'attache à promouvoir le mode de vie européen.

L'objectif de la nouvelle Commission a été de mettre sur la table un document qui conduirait les États membres à une discussion politique. La situation de départ est complexe : d'une part, il y a un manque évident de consensus sur les questions de migration entre les pays du groupe de Visegrad (Hongrie, Pologne, Slovaquie et République tchèque) et les autres ; d'autre part, il y a également une certaine méfiance entre les pays du Nord et du Sud de l'Union, en ce qui concerne le respect des obligations en matière de migration. Avec sa proposition, la Commission tente de faire en sorte que le débat, qui est souvent plus émotionnel qu'intellectuel, soit réorienté vers la négociation politique. À cet égard, le document proposé doit être considéré comme un point de départ.  

Avec toutes les conditions déterminées par le contexte politique précédent, le document qui en résulte propose un contenu minimum qui nous permettra de nous lancer sur une question aussi conflictuelle entre les États membres. C'est pourquoi le Pacte a été source de déception pour de nombreux acteurs européens - notamment ceux qui sont les plus impliqués dans l'amélioration des conditions des migrants arrivant en Europe - en raison de leur manque d'ambition dans la mise en place d'une véritable politique migratoire basée sur les valeurs sur lesquelles l'Union européenne est fondée.

Le contenu du pacte se réfère à trois domaines d'action : externe (coopération avec les États tiers), frontalier (gestion des frontières de l'UE) et interne (migration légale et politiques d'inclusion). Bien qu'il soit très difficile de résumer en quelques lignes tous les aspects qui sont inclus dans le document, nous proposons ci-dessous un résumé des propositions qui nous semblent les plus pertinentes : 

Dans la sphère extérieure, il y a un engagement à coopérer avec les États tiers. Dans le cas du continent africain, par exemple, la compréhension avec l'Union africaine est renforcée (sans préjudice de la reconnaissance du fait que le contexte migratoire de chaque pays est différent et que l'UE doit être sensible à ces différences). L'aide économique aux pays d'origine est encouragée pour affaiblir les raisons qui poussent les citoyens africains à émigrer (qui, pour l'UE, sont principalement d'ordre démographique et économique). On suppose implicitement et explicitement que l'aide au développement est un facteur clé de la réduction des flux migratoires (même si certaines études montrent qu'il n'y a pas de correspondance exacte entre la migration et la pauvreté).

La gestion des frontières comprend plusieurs initiatives : un contrôle de sécurité, de santé et d'identité est proposé aux frontières afin de déterminer quels migrants peuvent obtenir l'asile et lesquels doivent être renvoyés dans leur pays d'origine. Dans ce processus, les droits fondamentaux de toutes les personnes concernées sont garantis. L'ensemble de la procédure à la frontière devrait durer au maximum 12 semaines. En outre, la base de données Eurodac est renforcée en tant qu'instrument d'aide à la gestion des migrations, et pas seulement de l'asile. La figure du coordinateur européen pour les retours est également créée, ainsi qu'une agence européenne de l'asile.  

Le pacte consacre également une section aux opérations de sauvetage et de récupération en mer, qui rend explicite le rejet de la criminalisation des ONG et des autres acteurs qui effectuent des opérations de recherche et de sauvetage dans le respect de la loi.

En ce qui concerne le niveau intracommunautaire, la proposition parle de solidarité constante entre les États membres : par exemple, elle évite de surcharger les pays qui sont en première ligne mais, en même temps, elle évite d'imposer des quotas obligatoires de migrants aux différents États ; dans ce dernier aspect, elle met l'accent sur le financement des retours : un État membre « parraine » le retour dans un pays avec lequel il entretient de bonnes relations (ainsi, par exemple, si un pays comme la France entretient de bonnes relations avec l'Afghanistan, ce pays peut gérer le retour des migrants afghans qui sont arrivés sur les côtes grecques ou chypriotes, et qui y restent jusqu'à ce que leur retour soit résolu).  

En guise de conclusion, compte tenu des avis et analyses soulevés par le pacte au cours du mois dernier, nous pouvons dire que les évaluations des organisations du troisième secteur social s'accordent à dire que la Commission a accordé plus d'importance aux aspects axés sur la sécurité, au détriment des considérations relatives à l'intégration des migrants dans les sociétés d'accueil. La Commission, pour sa part, souligne qu'il s'agit d'un ensemble cohérent de mesures, qui respecte les valeurs sur lesquelles l'Union européenne est fondée (par exemple, le respect de la dignité des personnes dans les processus de demande d'asile et de retour) et vise à créer les conditions d'une discussion politique entre les États membres afin de remplacer les initiatives qui ne sont pas fondées sur la solidarité ou le consensus. 

Luis Guerra, professeur de langue espagnole à l'Université européenne de Madrid, est l'un des principaux chercheurs du projet INMIGRA3-CM, financé par la Communauté de Madrid et le Fonds social européen