La visite de Mohammed bin Salman en Jordanie scelle une nouvelle étape dans les relations entre Riyad et Amman

La tournée régionale du prince héritier saoudien Mohammed bin Salman se poursuit. Après une visite en Égypte, où il a signé 14 accords d'une valeur de 7,7 milliards de dollars avec le président Abdel Fattah Al Sisi, le dirigeant de facto de l'Arabie saoudite s'est rendu en Jordanie pour rencontrer le roi Abdallah II et le prince héritier Hussein bin Abdallah.
? | HRH Crown Prince Mohammed bin Salman arrives in #Amman and was welcomed by the King of #Jordan HM @KingAbdullahII. ????
— Foreign Ministry ?? (@KSAmofaEN) June 21, 2022
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Le monarque jordanien et son fils ont reçu Bin Salman à l'aéroport international Queen Alia, où, après l'atterrissage et pendant la cérémonie d'accueil, les deux hymnes nationaux ont été joués et 21 tirs d'artillerie ont été effectués, selon l'agence de presse jordanienne.
? | HRH Crown Prince Mohammed bin Salman and HM @KingAbdullahII, King of #Jordan reviewed aspects of bilateral relations between the two countries, prospects for joint cooperation, and opportunities to enhance them in various fields. ????
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Ensuite, le roi Abdallah II a remis au prince saoudien le collier Hussein bin Ali, "une incarnation des relations historiques distinguées qui lient les deux pays" et que la Jordanie accorde aux rois, princes et chefs d'État, selon la chaîne saoudienne Al Ekhbariya.
His Majesty King Abdullah II bestows Al Hussein bin Ali Medal on Crown Prince Mohammed bin Salman bin Abdulaziz Al Saud, who is also the deputy prime minister and minister of defence of Saudi Arabia #Jordan #KSA pic.twitter.com/oOy1QjoSZJ
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Le monarque jordanien et le prince héritier saoudien ont également tenu une réunion au palais Al Husseiniya au cours de laquelle ils ont réaffirmé leur "fierté du niveau des relations fraternelles, historiques et bien établies qui unissent les deux royaumes et peuples frères", ainsi que "leur empressement à les consolider dans tous les domaines", selon l'agence de presse jordanienne. Les deux dirigeants ont également discuté des derniers développements régionaux et internationaux, soulignant la question palestinienne et le soutien aux "frères palestiniens".
His Majesty King Abdullah II, accompanied by His Royal Highness Crown Prince Al Hussein, holds talks with Crown Prince Mohammed bin Salman bin Abdulaziz Al Saud, the deputy prime minister and minister of defence of Saudi Arabia at Al Husseiniya Palace #Jordan #KSA pic.twitter.com/gXpUH55VJo
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Abdullah II a souligné le "rôle central" de l'Arabie saoudite dans les questions liées aux nations arabes et islamiques pour parvenir à "la paix dans la région et dans le monde". "La sécurité de l'Arabie saoudite fait partie de la sécurité de la Jordanie et de la région", a-t-il ajouté.
His Majesty King Abdullah II, accompanied by His Royal Highness Crown Prince Al Hussein, meets with Saudi Crown Prince Mohammed bin Salman bin Abdulaziz Al Saud at Al Husseiniya Palace #Jordan #KSA pic.twitter.com/j2vApsHjIp
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La première visite de Bin Salman en Jordanie après plusieurs années de tensions entre Riyad et Amman intervient à un moment où l'économie du Royaume hachémite se débat avec les conséquences de la pandémie et de la guerre en Ukraine. Par conséquent, de nombreux analystes et chefs d'entreprise jordaniens considèrent la visite du prince héritier saoudien comme une occasion d'améliorer la situation économique nationale.
Comme le souligne Reuters, les responsables jordaniens attendent de Bin Salman qu'il débloque au moins 3 milliards de dollars de projets d'investissement que l'Arabie saoudite a promis ces dernières années mais qui ne se sont pas encore concrétisés. En effet, un haut fonctionnaire jordanien a révélé à l'agence de presse que le Fonds d'investissement public (FIP) de Riyad envisage d'investir des milliards de dollars dans des mégaprojets d'infrastructure en Jordanie, dont un projet ferroviaire estimé à 2,5 milliards de dollars.
An official welcoming ceremony is held for Crown Prince Mohammed bin Salman bin Abdulaziz Al Saud, the deputy prime minister and minister of defence of Saudi Arabia, at Queen Alia International Airport #Jordan #KSA pic.twitter.com/LTOQSxW9cV
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Ces affirmations ont été étayées par une déclaration du prince héritier saoudien selon laquelle il existe de "grandes opportunités" en Jordanie auxquelles le Royaume est "désireux de participer activement", notant que ces investissements "apporteront des avantages aux deux pays". Bin Salman a également déclaré qu'il était prêt à "faire passer les relations à une nouvelle phase", selon Reuters.
La visite du dirigeant saoudien en Jordanie a donc une importante composante économique, mais elle vise également à assurer l'unité avant la visite du président américain Joe Biden, qui rencontrera les dirigeants du Conseil de coopération du Golfe, ainsi que l'Irak, la Jordanie et l'Égypte. "L'aspect politique de la visite est clair, à savoir la mobilisation du front arabe avant le sommet avec Biden, tandis qu'il y a également un aspect économique, à savoir le soutien à la Jordanie par le biais d'investissements et d'accords", a déclaré Jawad Al-Hamad, directeur du Centre d'études du Moyen-Orient en Jordanie, au média arabophone Al-Ain.
His Majesty King Abdullah II and His Royal Highness Crown Prince Al Hussein receive Crown Prince Mohammed bin Salman bin Abdulaziz Al Saud, the deputy prime minister and minister of defence of Saudi Arabia at Queen Alia International Airport #Jordan #KSA pic.twitter.com/8iRFxXjLj4
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D'autre part, le voyage de Bin Salman à Amman vise à initier une nouvelle étape dans les relations entre les deux royaumes après des années d'éloignement. Les tensions entre Riyad et Amman ont atteint leur paroxysme avec la tentative de coup d'État orchestrée par le demi-frère du roi de Jordanie, le prince Hamza. L'une des personnes arrêtées et condamnées à 15 ans de prison pour sa participation au complot est Bassem Awadallah, ancien conseiller de Bin Salman. Dans une interview accordée à CNN, Abdullah II n'a pas nié le rôle de Riyad dans la tentative de coup d'État, sans toutefois accuser directement la monarchie du Golfe.

La Jordanie resserre ses liens avec l'Arabie saoudite dans un souci de stabilité économique et régionale. Comme l'a déclaré une source jordanienne à Reuters, Amman, tout comme Riyad, est "profondément préoccupé" par l'Iran en raison de ses "ambitions nucléaires" et de son "rôle déstabilisateur" dans la région. Par conséquent, dans le but de renforcer les relations, les responsables jordaniens ont souligné à l'agence de presse que l'affaire Bassem Awadallah est "derrière nous".
Toutefois, ce n'était pas la seule friction entre l'Arabie saoudite et la Jordanie. Sous l'ancien président américain Donald Trump, les bonnes relations de Washington avec Riyad ont fait qu'Amman s'est sentie déplacée dans le processus de paix israélo-arabe. De même, la garde des lieux saints de Jérusalem a été un point de discorde entre les deux pays. La Jordanie est la gardienne des lieux saints musulmans et chrétiens, bien que ces dernières années, plusieurs rapports aient révélé les efforts de l'Arabie saoudite pour contrôler les sites religieux de la ville.

Le politologue jordanien Abdul Ghaffar Al-Obeidi salue la visite du prince héritier saoudien en Jordanie, à Al-Ain, comme une étape clé dans la "consolidation des relations historiques entre l'Arabie saoudite et la Jordanie", soulignant que le monde arabe a besoin de telles rencontres qui "comblent les différences et apportent des avantages économiques et politiques aux peuples de la région".