Les raisons qui rapprochent l'Iran et la Russie sur les questions énergétiques

L'isolement dans lequel l'Europe pousse Moscou oblige les Russes à chercher de nouvelles ressources pour continuer à développer leur industrie et à tirer parti des exportations que l'Union européenne tente d'éviter avec chaque train de sanctions. Dans ce contexte, la Russie a considéré l'Iran comme l'une des alternatives les plus attrayantes et a déjà mis en branle toute sa machinerie pour renforcer les liens qui unissent le peuple de Vladimir Poutine à Téhéran. Outre la vente d'armes militaires iraniennes, de nouvelles initiatives sont prises dans le secteur de l'énergie.
L'Iran ne devrait pas, du moins sur le papier, être particulièrement intéressé à s'asseoir pour négocier des importations de gaz avec la Russie. Le pays du président Ebrahim Raisi dispose d'importantes réserves de pétrole et de gaz - certaines des plus importantes au monde, en fait - alors pourquoi l'Iran négocierait-il avec le Kremlin l'achat de nouvelles ressources énergétiques ? L'explication est aussi simple que d'habitude : un actif exploité peut toujours être exploité davantage. L'Iran, bien qu'exportateur, veut le devenir davantage, améliorer ses infrastructures et être en mesure de tirer encore plus d'argent de ses ressources

Et le contexte ne pourrait être plus idéal pour l'un comme pour l'autre, dans le cadre des sanctions auxquelles sont soumis la Russie et l'Iran. L'écrivain et analyste politique serbe Nikola Mikovic a expliqué à Al Arab que Téhéran veut de nouveaux gazoducs pour exporter ses ressources énergétiques en dehors du pays. Les pipelines reliant le pays dirigé par Ali Khamenei à la Turquie et à l'Irak ne sont pas prêts à transporter de grandes quantités. Cela se reflète clairement dans les chiffres. Le total des exportations de gaz iranien en 2021 s'est élevé à 17 milliards de mètres cubes, contre 241 milliards de mètres cubes pour la Russie la même année.
L'Iran a besoin de l'aide de la Russie pour moderniser ses infrastructures et Moscou a besoin de nouveaux acheteurs face aux sanctions de l'UE. Ce n'était qu'une question de temps avant qu'un rapprochement ne se produise et, bien qu'il s'intensifie actuellement, il a fait ses premiers pas en juillet. Au cours de l'été de cette année, le géant russe de l'énergie Gazprom a signé un accord de 40 milliards de dollars avec la Société nationale iranienne du pétrole. Dans le cadre de ce mémorandum, Moscou s'engage à aider l'Iran à développer les champs gaziers de Kish et de North Pars, ainsi que six autres champs pétroliers.
La seule chose qui pourrait faire obstacle à cette initiative lucrative, ce sont les sanctions de l'UE-27, mais les deux pays considèrent qu'il est relativement facile de les contourner et de forcer l'UE à dépendre du gaz des Émirats arabes unis, de l'Arabie saoudite et des États-Unis. Si tel est le cas, la hausse déjà prévisible des prix du gaz serait encore plus sévère que prévu, surtout après l'annonce de l'OPEP+ de réduire la production de pétrole de deux millions de barils par jour.
Si cette alliance énergétique entre la Russie et l'Iran laisse déjà présager des bénéfices importants pour les deux pays, elle pourrait placer Téhéran dans une situation encore plus avantageuse. Les Iraniens se sont présentés à l'Europe comme une nouvelle alternative pour l'envoi de gaz sur le Vieux Continent. Cependant, la proposition ne semble pas avoir d'avenir car les sanctions imposées par l'Occident contre le régime des ayatollahs rendent tout accord dans ce domaine impossible. Et pas seulement ça. Précisément, la réduction de l'infrastructure iranienne susmentionnée rendrait très difficile l'augmentation du niveau des exportations, surtout lorsque l'objectif est de fournir l'Europe, de sorte que la tentative était inutile dès le départ.

On pourrait le comprendre un peu mieux si l'on tient compte de l'une des alternatives que, selon certains experts, Téhéran pourrait envisager d'acheter du gaz russe, non seulement pour sa consommation intérieure, mais aussi pour le vendre à un prix plus élevé. Le ministère iranien du Pétrole a annoncé l'achat de 9 millions de mètres cubes de gaz russe par jour pour sa propre consommation, auxquels il faut ajouter 6 millions de mètres cubes destinés à la Turquie, au Pakistan et à l'Afghanistan, ce qui laisse un gros bénéfice dans les caisses de l'Iran.
Ce rapprochement entre l'Iran et la Russie se comprend davantage comme une conséquence de l'isolement auquel les deux pays - surtout la Russie - sont soumis par les sanctions occidentales. C'est ce contexte qui a conduit Moscou et Téhéran à conclure un accord selon lequel, d'une part, la Russie sera en mesure de vendre ses ressources énergétiques et de prendre le contrôle des ressources iraniennes et, d'autre part, les forces d'Ali Khamanei profitent de l'isolement de la Russie pour obtenir un bon prix pour le gaz soviétique qui, à son tour, laisse un avantage économique important lorsqu'il passe par les gazoducs iraniens.