L'UE se donne trois mois pour répondre au "jeu de la provocation" de la Turquie

L'Union européenne (UE), qui a haussé le ton contre la Turquie mais a laissé la porte ouverte à la possibilité d'un dialogue, se donne jusqu'en décembre au plus tard pour répondre au "jeu provocateur" d'Ankara en Méditerranée orientale, selon un haut responsable de l'UE. C'est l'une des réalisations du sommet des 1er et 2 octobre à Bruxelles, où les 27 sont finalement parvenus à un compromis pour sanctionner le régime de Minsk et durcir sa position contre Ankara, comme le demandait Chypre.
Si Chypre n'avait pas réussi à lever son veto contre les sanctions déjà convenues contre le Belarus si les mêmes normes n'étaient pas appliquées à la Turquie, les dirigeants européens auraient eu l'air "ridicule" aux yeux du monde, a déclaré le haut fonctionnaire à un groupe de correspondants à Bruxelles, dont Efe.
Lors de ce dernier sommet, selon la source, les États membres ont pris conscience que "la Turquie n'est pas le problème de la Grèce et de Chypre, mais celui de l'UE", en raison de ses actions illégales en Méditerranée orientale et de sa présence dans les conflits syrien et libyen, ainsi que dans le Haut-Karabakh, soutenant l'Azerbaïdjan contre l'Arménie. "Nous sommes crédibles", a déclaré le président du Conseil européen, Charles Michel, à l'issue de ce sommet extraordinaire des 27 États membres, consacré notamment aux relations extérieures de l'UE.
Maintenant, "la Turquie doit montrer qu'elle veut aller avec nous sur la voie constructive", a ajouté la présidente de la Commission européenne, Ursula von der Leyen, lors de la même conférence de presse.
Mais si le président turc, Recep Tayyip Erdogan, abonde en "provocations et pressions" et choisit la voie des "décisions unilatérales qui violent la légalité internationale", l'UE utilisera "tous ses outils", a averti M. von der Leyen.
Ces "outils" commenceront à être appliqués à la fin de cette année si la Turquie, l'un des plus anciens membres de l'OTAN, persiste dans cette voie dans les eaux de la Méditerranée orientale, puisque ses opérations dans la région affectent la souveraineté des pays membres de l'UE, en l'occurrence la Grèce et Chypre. L'accord final a été "la seule zone d'atterrissage possible" du sommet. Ainsi, bien qu'il ait été élaboré avant le début du sommet, il n'a pas été mis sur la table dès le départ afin de ne pas le gâcher et de laisser place à un débat au sein du Conseil, selon la source.
Si l'unanimité a été atteinte sur la question biélorusse, c'est parce que les 27 ont réussi à convaincre Nicosie d'abandonner son veto. Mais ce n'était pas facile, car Ankara poursuivait ses forages illégaux dans les eaux chypriotes, et le président Nikos Anastasiades exigeait un message fort de la part de l'UE.
Les 27 ont passé "8 ou 9 heures" du sommet à chercher une formule qui leur permettrait de faire preuve de fermeté envers Ankara sans ruiner les progrès réalisés en Grèce ces dernières semaines, selon le haut responsable. C'est précisément le Premier ministre grec, Kyriakos Mitsotakis, qui a joué un rôle important dans le résultat, en montrant son soutien au président chypriote et, de temps en temps, en lui demandant de modérer ses exigences, selon la même source.
Et bien qu'aucune sanction n'ait finalement été imposée à Ankara, il lui a été clairement indiqué qu'il serait dans son intérêt d'être moins explosif à un moment où le pays est dévoré par la crise économique, selon le haut responsable. Les Européens s'engagent donc à "mettre en œuvre un programme politique UE-Turquie positif" si Ankara accepte "les efforts pour mettre fin aux activités illégales concernant la Grèce et Chypre".
Sinon, ils sont prêts à utiliser "tous les instruments et options à leur disposition (...) pour défendre les intérêts de l'UE et de ses États membres" et à prendre "des décisions, si nécessaire, au plus tard lors de leur réunion de décembre".
Tel est le cadre et le calendrier, et c'est désormais le tour de la diplomatie : Charles Michel et Kyriakos Mitsotakis rencontreront tous deux Recep Tayyip Erdogan dans les prochains jours.