Le chef de l'Etat algérien a expliqué qu'il avait été invité par son homologue français lors d'une conversation téléphonique au cours de laquelle ils se sont félicités mutuellement pour la nouvelle année

Tebboune sur les attentes de la visite d'État à Paris en mai

PHOTO/ARCHIVE - Le président algérien Abdelmadjid Tebboune

Les relations bilatérales entre Alger et Paris - compliquées depuis l'indépendance de l'Algérie en 1962 - sont en tête de l'agenda français depuis septembre 2021, lorsque le président Macron a accusé le système "politico-militaire" d'Alger de bénéficier d'une "rente de situation mémorielle [contre la France]" concernant l'époque coloniale et la guerre d'indépendance, et a remis en question l'existence d'une nation algérienne avant la colonisation française. 

Ces déclarations ont fini par déclencher l'une des pires crises diplomatiques entre les deux puissances au cours des 15 dernières années. L'Algérie a retiré son ambassadeur de Paris et interdit aux avions français de traverser son espace aérien pour ravitailler les troupes de l'opération Barkhane au Mali. Pour sa part, la France - dans le but de faire pression sur les gouvernements d'Afrique du Nord pour qu'ils réadmettent leurs ressortissants expulsés du territoire français - a réduit de moitié les visas qu'elle accorde aux citoyens algériens (comme elle l'a fait pour les ressortissants marocains et tunisiens). Les relations diplomatiques franco-algériennes sont restées interrompues pendant plusieurs mois après l'escalade des tensions. 

Mais en août 2022 - coïncidant avec le 60e anniversaire de la fin de la guerre franco-algérienne et de la proclamation de l'indépendance de l'Algérie - le président Emmanuel Macron s'est rendu en Algérie. La rencontre entre les deux dirigeants a abouti à la "Déclaration d'Alger" pour un "partenariat d'amitié renouvelé" qui, selon les termes du locataire de l'Elysée, constitue un élan "vers la jeunesse et l'avenir". Les autorités algériennes, dans la même veine, ont compris la visite de Macron comme "la volonté d'encourager une nouvelle vision basée sur l'égalité de traitement et l'équilibre des intérêts". 

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Depuis le début de la guerre en Ukraine, plusieurs pays de l'UE ont manifesté leur intérêt pour le gaz algérien afin de réduire leur dépendance énergétique vis-à-vis de Moscou, plaçant ainsi Alger en position de partenaire potentiel. "L'Union européenne et la France ne sont pas nos adversaires", a déclaré Tebboune dans une interview au Figaro sur l'état des relations énergétiques avec Paris, "donc si la France nous demandait d'augmenter les exportations de gaz, nous le ferions". 

Et bien que le président français ait tenté à plus d'une occasion de se distancer des rumeurs concernant son intérêt pour le gaz algérien, lors de la visite d'août 2022, la directrice du géant de l'énergie Engie, Catherine MacGregor, faisait partie de la délégation qui l'accompagnait. 

Maintenant, suite à l'amélioration des relations, le président algérien, Abdelmadjid Tebboune, a annoncé son intention de se rendre à Paris - en visite d'État officielle - en mai pour poursuivre ce que Macron a décrit (dans une interview pour Le Point) comme "un travail d'amitié sans précédent". Tebboune a expliqué, via un communiqué officiel du bureau présidentiel, que son homologue français l'a contacté par téléphone pour "échanger des félicitations à l'occasion du Nouvel An, souhaitant aux deux peuples de poursuivre sur la voie du progrès et de la prospérité", après l'avoir invité à se rendre en France. 

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Cependant, l'annonce ne semble pas avoir été bien accueillie dans les milieux officiels français, qui voient dans ce rapprochement une approbation tacite du régime algérien. Tant au niveau de sa politique intérieure (répression de ses détracteurs) que de ses orientations internationales (l'Algérie a défendu à plusieurs reprises son caractère "non-aligné" sur des questions telles que la guerre en Ukraine, car elle entretient des liens politiques, économiques et militaires étroits avec Moscou). 

Cependant, les déclarations des deux dirigeants au Figaro et au Point à la fin de l'année 2022 laissaient déjà présager que Tebboune serait remis à son homologue français dans l'année à venir. Le président algérien a expliqué au Figaro son intention de se rendre en France en 2023, faisant allusion à la "complicité" et à l'"amitié réciproque" avec Macron, et affirmant qu'il voit en lui "l'incarnation d'une nouvelle génération qui pourrait sauver les relations entre les deux pays". Pour sa part, le chef de l'État français a également exprimé son souhait de voir Tebboune effectuer une visite officielle à Paris, affirmant que "cela aura un sens pour l'histoire du peuple algérien". Pour les Français, ce sera une grande occasion de comprendre des réalités souvent cachées".  

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Selon les allusions du président Macron au Point, l'ordre du jour officiel de la réunion devrait entrecouper les rencontres officielles de Tebboune de plusieurs cérémonies d'hommage devant le monument du prince Abdelkader, symbole de la résistance algérienne contre la colonisation française, dans le cimetière de la ville d'Amboise. "Ce serait un moment très beau et très fort", a déclaré le président français lorsqu'il a été interrogé sur cette possibilité. 

Toutefois, cette annonce intervient après le plaidoyer de Macron selon lequel il refuse de "s'excuser" auprès des Algériens pour le processus de colonisation, bien qu'il affirme vouloir continuer à travailler avec Alger sur la réconciliation mutuelle et la préservation de la mémoire historique. Le travail de mémoire historique "n'est pas un calcul, c'est le contraire. C'est reconnaître qu'il y a des choses qui ne peuvent être décrites, des choses qui ne peuvent être comprises, des choses qui ne peuvent être prouvées et des choses qui ne peuvent être pardonnées", a-t-il déclaré au Point.