Mardi 4 juillet 2023, dans une logique de normalisation des relations turco-égyptiennes depuis le coup d’État de 2013 en Égypte, les deux chefs d’État ont désigné de nouveaux ambassadeurs dans leurs capitales respectives

La Turquie et l’Égypte rouvrent leurs ambassades pour la première fois depuis 2013

AFP/PORTAVOZ DEL MINISTERIO DE EXTERIORES EGIPCIO - Esta foto del folleto publicada por el Ministerio de Relaciones Exteriores de Egipto muestra al ministro de Relaciones Exteriores de Egipto, Sameh Shoukri (izq.), reuniéndose con su homólogo turco, Mevlut Cavusoglu, en Adana, en el centro-sur de Turquía, el 27 de febrero de 2023
AFP/Porte-parole du ministère égyptien des Affaires étrangères - Cette photo diffusée par le ministère égyptien des Affaires étrangères montre le ministre égyptien des Affaires étrangères Sameh Shoukri (G) rencontrant son homologue turc Mevlut Cavusoglu à Adana, dans le centre-sud de la Turquie, le 27 février 2023

Il y a dix ans presque jour pour jour, le président Abdel Fattah al-Sissi alors général de l’armée égyptienne avait chassé le premier président élu démocratiquement du pays. Élu en 2012, Mohammed Morsi appartenait au Parti de la liberté et de la justice, une formation issue des Frères musulmans soutenue par le président Recep Tayyip Erdogan et son Parti de la Justice et du Développement (AKP) du même courant. Après la destitution de Morsi et les critiques turques vis-à-vis du nouveau gouvernement égyptien, l’ambassadeur turc de l’époque Hüseyin Avni Botsali a été déclaré persona non grata et contraint de quitter le pays. C’est dans ce contexte que les relations turco-égyptiennes se sont détériorées pendant une dizaine d’années.  

Le 4 juillet 2023, Recep Tayyip Erdogan et Abdel Fatah al-Sissi ont annoncé rouvrir leurs ambassades au Caire et à Ankara et ont nommé leurs nouveaux ambassadeurs Salih Mutlu Sen et Amr Elhamamy. Selon Arab News, cette démarche aurait pour objectif la renormalisation des relations entre les deux pays. Elle a notamment été saluée par le ministre des Affaires étrangères saoudien dans un communiqué. 

En effet, le changement de gouvernement égyptien dans le contexte des printemps arabes du début des années 2010 n’est pas le seul dossier sur lequel les deux États se sont affrontés durant cette décennie de tension. Sur le théâtre libyen, la Turquie a soutenu le Gouvernement d'entente nationale (GNA) reconnu par les Nations unies tandis que l’Égypte a soutenu l'Armée nationale libyenne (ANL), contrôlée par le général Khalifa Haftar. Apparue en 2014, l’ANL, en promettant de s’attaquer aux groupes « terroristes » qui se sont immiscés en Libye depuis le Sahel, a tout de suite été pris au sérieux par l’Égypte, pour qui la menace terroriste représente l’un des principaux défis étatiques. 

PHOTO/AFP - Combinación de imágenes del presidente de Turquía y líder del gobernante Partido de la Justicia y el Desarrollo (AKP) Recep Tayyip Erdogan y del presidente egipcio Abdel Fattah al-Sissi
PHOTO/AFP - Combinaison d'images du président turc et chef du Parti de la justice et du développement (AKP) Recep Tayyip Erdogan et du président égyptien Abdel Fattah al-Sissi

En outre, la signature d’un pacte entre la Turquie et le GNA le 27 novembre 2019 concernant la souveraineté sur les zones maritimes de la Méditerranée a accentué les tensions turco-égyptiennes. Depuis plusieurs années, Ankara cherche à s’implanter dans la région méditerranéenne, qui contiendrait des millions de barils de pétrole et des billions de mètres cubes de gaz naturel, afin de diversifier son marché énergétique.  

Malgré ce différend, les premiers signes d’un dégel sont apparus en mai 2021, lorsqu’une délégation turque s’est rendue au Caire, puis se sont accélérés à partir de 2022 lorsque Recep Tayyip Erdogan et Abdel Fattah al-Sissi se sont rencontrés lors de la Coupe du monde de football au Qatar. Dès lors, le président al-Sissi a multiplié les appels téléphoniques avec son homologue turc. En février dernier, après le tremblement terre qui a frappé la Turquie et la Syrie, le président égyptien a apporté son soutien à Recep Tayyip Erdogan. Le ministre des Affaires étrangères égyptien, Sameh Shoukry, s’est également rendu dans les régions touchées dans un message de solidarité, selon Arab News. Enfin, Abdel Fattah al-Sissi a été l’un des premiers dirigeants à féliciter Recep Tayyip Erdogan pour sa réélection en mai 2023.  

La réouverture des ambassades turques et égyptiennes marque l’apogée du processus de normalisation entre les deux États, dont les relations bilatérales devraient continuer de se développer.