Landaluce a souligné l'importance d'Algésiras en tant que frontière sud de l'Union européenne

La déclaration d'Algésiras : les bases politiques de l'immigration de la nouvelle Europe

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Le maire d'Algeciras, José Ignacio Landaluce, a présenté dimanche dernier la déclaration d'Algeciras sur les défis auxquels l'Union européenne est confrontée en matière d'immigration, dans le cadre de l'événement "L'UE en matière d'immigration et d'asile", promu par le mouvement européen. 

Dans sa présentation, M. Landaluce a souligné la valeur de la fameuse réunion d'Algésiras, une ville qui, selon lui, représente " la grande frontière sud de l'UE, où coexistent plus de 109 nationalités différentes ". Il a ajouté qu'elle est "le siège de la grande opération du détroit de Gibraltar" et qu'elle possède l'un des ports les plus importants du monde.

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Selon le maire, tous les principes contenus dans la déclaration serviront de base à la construction de "l'Europe de demain", une Europe qui doit refléter la réalité historique du moment présent, sans connotation politique, et assurer un contrôle des frontières "rigoureux et légaliste", dans lequel les droits des immigrants et des demandeurs d'asile sont garantis. 

Vous trouverez ci-dessous l'intégralité de la déclaration d'Algésiras :

Adoptée à l'occasion de l'activité du Mouvement européen pour la Conférence sur l'avenir de l'Europe, organisée par le Centre associé UNED du Campo de Gibraltar, le Conseil fédéral espagnol du Mouvement européen et le Conseil andalou du Mouvement européen, avec la collaboration du ministère des Affaires étrangères (programmes Global Spain et Let's Talk about Europe), Europe-Direct du Campo de Gibraltar, la mairie d'Algesiras, le conseil provincial de Cadix et la mairie de San Roque.

A cette occasion,

A.- Nous réaffirmons que les compétences partagées dans le domaine de l'immigration et de l'asile entre les États membres et l'UE se sont révélées utiles pour relever les grands défis migratoires de notre époque. L'article 4-2-j du TFUE établit cette compétence partagée dans le cadre de l'espace de liberté, de sécurité et de justice. Les compétences en matière d'immigration, de contrôle des frontières et d'asile sont autonomes mais interdépendantes.

B.- Nous réaffirmons la nécessité de l'existence de FRONTEX, de l'Agence européenne d'appui en matière d'asile (EASO) et de l'Agence européenne des systèmes d'information à grande échelle (eu-LISA), car ils contribuent à assurer le fonctionnement de l'espace Schengen et à atteindre les objectifs énoncés à l'article 79-1 du TFUE. 79-1 TFUE, c'est-à-dire "une gestion efficace des flux migratoires, un traitement équitable des ressortissants de pays tiers résidant légalement dans les États membres, ainsi que la prévention de l'immigration clandestine et de la traite des êtres humains et le renforcement des mesures de lutte contre ces phénomènes".

C.- Nous réaffirmons que l'UE peut intervenir, conformément à l'art. 79-2 TFUE en établissant "(a) les conditions d'entrée et de séjour et les normes relatives à la délivrance par les États membres de visas et de titres de séjour de longue durée, y compris aux fins de regroupement familial ; b) la définition des droits des ressortissants de pays tiers résidant légalement dans un État membre, y compris les conditions de la liberté de circulation et de séjour dans les autres États membres ; c) l'immigration clandestine et le séjour irrégulier, y compris l'expulsion et le rapatriement des personnes en séjour irrégulier ; d) la lutte contre la traite des êtres humains, en particulier des femmes et des enfants".

D.- Nous réaffirmons que l'institution juridique de l'asile et du refuge, en particulier les principes de non-refoulement, de protection et d'assistance, malgré les difficultés d'application des normes européennes communes, qui découlent des normes supérieures du droit international, des droits de l'homme et des valeurs fermement établies dans les États européens. Le régime d'asile européen commun fixe donc des normes minimales en matière de conditions d'accueil, de procédures et d'exigences concernant "la protection contre le refoulement, les permis de séjour, les documents de voyage, l'accès à l'emploi et à l'éducation, la protection sociale, les soins de santé, l'accès au logement et aux instruments d'intégration, ainsi que des dispositions spécifiques pour les mineurs et les personnes vulnérables". Il s'agit donc de normes qui doivent être maintenues et améliorées.

E.- Nous sommes conscients que la politique commune d'immigration et d'asile est un défi stratégique pour l'UE, qui doit aboutir à la recherche de solutions, comme le stipule le nouveau pacte sur les migrations et l'asile du 23 septembre 2020.

F.- Nous considérons que l'UE et ses États membres ont des obligations plus importantes dans le cadre de la prévention des conflits et des situations qui génèrent des mouvements forcés de population, c'est pourquoi ils doivent générer des politiques actives de coopération internationale qui incluent des composantes de renforcement démocratique et institutionnel et des mécanismes de protection et de défense des droits de l'homme.

G.- Nous considérons que les frontières terrestres et maritimes de l'UE sont devenues les plus inégales du monde en termes économiques et politiques, ainsi que des frontières entre deux mondes, ce qui nous place devant des frontières très "exigeantes". Une évaluation claire et rigoureuse du cadre frontalier exigeant de l'UE est une condition préalable nécessaire pour gérer ce voisinage de manière utile et constructive.

H.- Nous rejetons les manifestations xénophobes, racistes ou d'exclusion qui accusent les migrants, car une société inclusive fait partie de l'identité et des valeurs européennes.

En ce sens, afin de parvenir à une politique européenne commune d'immigration et d'asile plus juste, plus équilibrée et conforme aux valeurs européennes, il convient de prendre en compte les éléments suivants :

PROPOSITIONS

1.- La politique migratoire actuelle de l'UE est limitée, à court terme et non coordonnée et devrait être proactive. Il est donc nécessaire d'élaborer une réglementation européenne générale d'accès harmonisé pour les immigrants potentiels, qui permette également le maintien du système d'aide sociale actuel dans l'UE. 

2 - L'UE et ses États membres doivent être conscients que les déplacements humains non désirés ne peuvent pas faire peser des charges déséquilibrées sur les États européens les plus proches des lieux de contact. Pour cette raison, la solidarité européenne doit conduire à une répartition équitable des personnes déplacées, avec un financement européen et, si nécessaire, des contributions financières en fonction des différents niveaux de revenus. C'est pourquoi l'accueil des migrants issus d'afflux massifs doit être équitable dans le cadre de l'UE, tout comme la responsabilité des charges financières. 

3.- Le régime d'asile européen commun a montré ses faiblesses en ayant établi un cadre réglementaire qui a un besoin urgent d'être réformé, y compris la transformation de sa catégorie réglementaire de directives en règlements afin d'atteindre une plus grande harmonisation. 

4.- La solidarité européenne ne peut être volontaire, mais doit consister en l'adoption des réformes réglementaires nécessaires pour prévoir des obligations spécifiques, en tant qu'instrument structurel. En outre, tant que le système de Dublin et ses critères d'attribution de la responsabilité des demandes de protection internationale restent inchangés, la relocalisation en tant que mesure de solidarité doit être prééminente et ne peut être remplacée par une solidarité "flexible" au service du retour. Une approche de la solidarité fondée sur les droits de l'homme est nécessaire, afin de garantir la participation des demandeurs d'asile. 

5.- Il est nécessaire de réglementer des voies sûres d'accès à la protection internationale, en évitant le recours aux mafias et aux voyages dangereux qui entraînent une perte intolérable de vies humaines. 6.- Il est nécessaire de renforcer les mécanismes d'identification précoce des besoins de protection internationale des personnes

arrivant sur les côtes européennes et de les orienter vers la procédure d'asile.

7.- Les frontières méditerranéennes, en particulier, méritent une attention préférentielle de la part de l'UE. L'UE ne dispose pas de moyens suffisants pour gérer les flux migratoires incontrôlés. À cette fin, une coopération proactive avec les États de la rive sud, notamment le Maroc et d'autres États d'origine et de transit, est essentielle. 

8 - L'UE doit s'attaquer aux problèmes à la source, en facilitant le renforcement des capacités humaines et matérielles, ainsi que la sensibilisation pour améliorer les capacités opérationnelles et la structure institutionnelle.

9 - Lorsque les immigrants sont des mineurs non accompagnés, ce sont toujours les tribunaux et non les autorités gouvernementales qui devraient être chargés de déterminer l'intérêt supérieur du mineur, qui devrait régir toute action de l'État en matière de protection, y compris l'expulsion ou le retour le cas échéant.

10.- L'Union européenne et ses États membres doivent réglementer les processus d'intégration de manière à ce qu'ils aboutissent à l'acquisition de la nationalité (si l'immigrant le demande), et par conséquent, les principes d'intégration et d'égalité doivent primer sur toute autre considération.

11.- L'accès au séjour et les conditions légales de sa cessation ou de sa perte doivent être réglementés par l'UE de manière à ne pas rendre invisibles ou exclure les immigrants qui n'ont pas accédé ou ont perdu leur droit de séjour.

12.- La promotion de l'intégration doit se faire avec l'application effective du principe in dubio pro homine.

13 - La coopération internationale au développement ne devrait pas être conditionnée à la gestion des flux migratoires en provenance des États limitrophes de l'UE.

14.- Le système éducatif européen doit intégrer les valeurs de citoyenneté inclusive et de respect de la diversité afin de prévenir les jugements racistes ou xénophobes concernant l'immigration.

 Ces propositions nécessitent une volonté politique et un élan citoyen. Cela nécessite une application rigoureuse et une interprétation extensive des traités de l'UE ou, si nécessaire, leur réforme.

Algeciras, 9 octobre 2021.