Le Pakistan vote lors d'élections marquées par la violence et l'absence d'internet mobile

Le Pakistan vote jeudi lors d'élections législatives marquées par la violence et des soupçons de truquage, renforcés par la décision du gouvernement de couper les services d'internet mobile.
Nawaz Sharif, 74 ans, en exil depuis octobre, est le favori et semble bénéficier du soutien de l'armée, acteur politique central du pays.
S'il l'emporte, il sera Premier ministre pour la quatrième fois de sa carrière, à la tête de la Ligue musulmane du Pakistan (PML-N).
Par ailleurs, Imran Khan, 71 ans, ancien joueur de cricket très populaire et condamné à trois longues peines de prison, ne s'est pas présenté, ce qui a alimenté les soupçons d'impartialité.
Son parti, le Pakistan Tehreek-e-Insaf (PTI), a été victime de nombreuses arrestations et défections forcées et a été empêché de faire campagne.
Peu après l'ouverture des bureaux de vote, le ministère de l'intérieur a annoncé que les services d'internet mobile étaient "temporairement suspendus" dans tout le pays pour des raisons de sécurité.

Dans le sud-ouest du Pakistan, deux agents de sécurité ont été tués jeudi dans l'explosion d'une bombe à l'extérieur d'un bureau de vote. Mercredi, 28 autres personnes ont été tuées dans deux attaques revendiquées par le groupe État islamique (EI) près de bureaux de candidats dans la province du Baloutchistan, dans le sud-ouest du pays.
Selon Alp Toker, directeur de Netblocks, une organisation de surveillance d'Internet, "la fermeture actuelle d'Internet est l'une des plus rigoureuses et des plus étendues que nous ayons observées dans n'importe quel pays".
Les bureaux de vote doivent fermer à 17h00 (12h00 GMT) pour les quelque 128 millions d'électeurs inscrits, sous la surveillance de quelque 650 000 membres des forces de sécurité.
Méfiance
"Ma seule crainte est de savoir si mon bulletin sera bien comptabilisé au nom du parti pour lequel j'ai voté", confie à l'AFP Syed Tasawar, un ouvrier du bâtiment de 39 ans, à la sortie d'un bureau de vote d'Islamabad.
La campagne n'a pas été très animée, preuve du désenchantement des Pakistanais à l'égard de la politique, dont 70% "ne font pas confiance à la transparence des élections", selon un sondage Gallup.

Le pays a été dirigé pendant des décennies par l'armée, mais en 2013, il y a eu un gouvernement civil pour la première fois.
Imran Khan, qui avait le soutien de l'armée lors de son élection en 2018, l'a défiée directement, l'accusant d'avoir orchestré sa destitution du poste de premier ministre en avril 2022.
Sa disgrâce semble avoir favorisé Nawaz Sharif. Et si son parti est favori, le résultat peut fortement varier en fonction du taux de participation, notamment chez les jeunes.
La majorité absolue est de toute façon difficile à atteindre pour la Ligue musulmane du Pakistan (PML-N), qui devra probablement former une coalition. Peut-être avec le Pakistan People's Party (PPP), le parti hérité de Bilawal Bhutto Zardari, fils de l'ancien premier ministre assassiné Benazir Bhutto et de l'ancien président Asif Ali Zardari.
Le Pakistan, qui dispose de l'arme atomique et occupe une position stratégique entre l'Afghanistan, la Chine, l'Inde et l'Iran, est confronté à de nombreux défis.
La sécurité s'est détériorée depuis le retour au pouvoir des talibans en Afghanistan en août 2021. L'économie pakistanaise est grevée par une dette massive et une inflation d'environ 30 %.